Le politologue Jean-Yves Camus décrypte le succès de l’extrême droite (plus de 36 %) au premier tour de l’élection présidentielle en Autriche, dimanche.
Comment expliquer ce score élevé du FPÖ ?
Ce vote a une dimension de protestation envers un système politique bloqué. Depuis 1945, les conservateurs et les sociaux-démocrates gouvernent soit en alternance, soit ensemble. Hormis l’émergence des Verts, les nouvelles formations sont rares. Il y a une demande forte de l’électorat autrichien de quelque chose de nouveau. Il y a aussi une habileté du FPÖ à surfer sur la crise des réfugiés. L’Autriche est en première ligne pour des raisons géographiques. Les mesures pourtant drastiques prises par le gouvernement n’ont pas convaincu les électeurs.
Est-ce un succès de la campagne de dédiabolisation menée par le FPÖ ?
Norbert Hofer a réussi là où la candidate du FPÖ pour la présidentielle de 2010, Barbara Rosenkranz, a échoué. Le parti a cette fois-ci choisi un candidat qui maîtrise son discours et qui n'appartient pas à l'aile radicale. Hofer a fait une campagne sans faute et a évité soigneusement tout dérapage. Du temps de Jörg Haider [le président du parti de 1986 à 2000, ndlr], il y avait dans les discours une apologie de certains aspects de la politique nazie. Hofer n'est pas dans ce type de démarche. Il y a des signes de respectabilité donnés à cette formation. Pour autant, le discours est plus radical sur la question des réfugiés.
Que provoquerait une victoire de Hofer ?
La fonction présidentielle autrichienne donne au chef de l’Etat des pouvoirs étendus mais qu’il n’utilise traditionnellement pas. Cependant, Hofer a menacé de dissoudre le Parlement si le gouvernement ne prenait pas des mesures radicales concernant les réfugiés. Mais au regard des chiffres du premier tour, l’hypothèse d’une victoire de ce candidat est faible.