Cinq Etats du nord-est des Etats-Unis votaient mardi pour les primaires. Les favoris républicain et démocrate, Donald Trump et Hillary Clinton ont accentué leur avance sur leurs concurrents.
Donald Trump triomphe encore
Il n'y a pas eu de suspense. A 20 h 30 heure locale, une demi-heure seulement après la fermeture des bureaux de vote, le triomphe de Donald Trump était déjà acté : cinq victoires sur cinq scrutins (Pennsylvanie, Maryland, Connecticut, Delaware et Rhode Island). Comme la semaine dernière dans son Etat natal de New York, où il avait raflé 90 des 95 délégués en jeu, Donald Trump fait quasiment carton plein dans la chasse aux délégués, grâce à un écart considérable avec ses rivaux (plus de quarante points d'avance dans le Delaware et le Maryland, 35 points en Pennsylvanie). «Je vais gagner. En ce qui me concerne, c'est fini. Je me considère comme le candidat naturel», a lancé Donald Trump, appelant ses deux adversaires, Ted Cruz et John Kasich, à jeter l'éponge. «Ces deux-là ne peuvent pas gagner», a ajouté l'homme d'affaires.
Pour être assuré de l'investiture républicaine, Donald Trump devra toutefois atteindre d'ici la fin des primaires, le 7 juin, le cap fatidique de 1 237 délégués. Après les scrutins de mardi soir, il en compte un peu plus de 950, près de 400 de plus que son premier poursuivant, Ted Cruz. Des trois candidats encore en lice, le magnat de l'immobilier est le seul à pouvoir mathématiquement atteindre la barre des 1 237 délégués. L'en empêcher est l'unique objectif de ses deux rivaux.
Dimanche, l'ultraconservateur sénateur Cruz et le modéré gouverneur Kasich, pourtant aux antipodes du spectre conservateur, ont ainsi annoncé une alliance surprenante et entièrement assumée. En vertu de cet accord de la dernière chance, Ted Cruz ne fera pas campagne dans l'Oregon (17 mai) et le Nouveau Mexique (7 juin) pour laisser le champ libre à John Kasich. Le gouverneur de l'Ohio, en échange, s'effacera dans l'Indiana (3 mai) afin de doper les chances de Ted Cruz. Objectif : éviter l'éparpillement des voix et priver Donald Trump de précieux délégués. Ce pacte de non-agression a aussitôt été qualifié de «désespéré» et «pathétique» par Donald Trump, qui y voit une preuve supplémentaire que le processus des primaires républicaines est truqué et le vote populaire méprisé par ses rivaux.
Alors que Donald Trump enchaîne les victoires, toute la stratégie de son principal concurrent, Ted Cruz, vise en effet à provoquer une convention «contestée» ou «ouverte», au cours de laquelle aucun candidat n'obtiendrait la majorité absolue lors du premier tour de scrutin. Dans ce scénario, inédit depuis 40 ans, la majorité des délégués seraient libres de leur choix dès le deuxième tour. En clair : un délégué contraint de voter Trump au premier tour – afin de respecter le vote populaire dans son Etat d'origine – pourrait ensuite voter Cruz. Or le sénateur du Texas, grâce à une minutieuse organisation de terrain, s'est montré très performant ces dernières semaines dans le processus de sélection des délégués, plaçant de nombreux fidèles dans les délégations qui se rendront à Cleveland en juillet. Après son sans-faute de mardi, Donald Trump a balayé la possibilité d'une convention contestée, se disant confiant de l'emporter dès le premier tour de scrutin.
Hillary Clinton sur la voie royale
Signe qu’il n’espérait pas grand-chose des cinq scrutins organisés ce mardi, Bernie Sanders avait choisi de s’exprimer mardi soir depuis la Virginie occidentale, où les électeurs ne voteront que le 10 mai. Beaucoup plus confiante, sa rivale Hillary Clinton tenait meeting à Philadelphie, la grande ville de Pennsylvanie, gros lot de la soirée. Elle s’y impose largement avec douze points d’avance. Une fois de plus, les sondages avaient vu juste : l’ancienne secrétaire d’Etat remporte quatre des cinq primaires du jour, dont deux (Delaware et Maryland) avec plus de vingt points d’écart. Le sénateur du Vermont, lui, l’emporte dans le Rhode Island, le moins peuplé – et le plus blanc – des cinq Etats en jeu.
Après sa très lourde défaite, la semaine dernière, dans le très médiatique et symbolique Etat de New York (16 points d'écart), Bernie Sanders subit donc un nouveau revers sur la côte est américaine, où le vote des minorités (noire américaine et hispanique) continue de lui échapper. Dans la campagne Sanders, le doute s'installe, même si le candidat et ses conseillers assurent qu'il restera en course jusqu'à la convention démocrate de Philadelphie, fin juillet. Comme le résume Politico, «le sénateur du Vermont est trop fort pour abandonner la bataille démocrate mais trop faible pour la gagner».
Grâce à ce «mini Tuesday» quasiment sans-faute, Hillary Clinton creuse un peu plus l’écart sur son adversaire dans la course aux délégués. Les chiffres définitifs ne sont pas encore connus, mais l’ancienne First Lady devrait accroitre son avance d’une cinquantaine de délégués. Sans tenir compte des quelque 700 super-délégués (libres de changer d’avis jusqu’à la convention mais qui soutiennent pour l’heure majoritairement Hillary Clinton), la favorite démocrate compte une avance d’environ 250 délégués sur Bernie Sanders. Selon FiveThirtyEight, le site d’analyse de sondages de Nate Silver, Hillary Clinton n’a besoin que d’environ 40 % des délégués restant à attribuer pour obtenir la majorité nécessaire à l’investiture. A l’inverse, Bernie Sanders doit désormais en gagner environ 65 % pour y parvenir. Un casse-tête arithmétique qui semble insoluble pour le sénateur du Vermont.
Pour autant, ce dernier ne donne aucun signe d’abandon prochain. Massivement financée par des petits donateurs, sa campagne dispose des moyens pour aller jusqu’au bout. Et signe que son message social électrise une partie des électeurs démocrates, ses meetings continuent d’attirer les foules, en particulier parmi les moins de 30 ans. Cette frange de l’électorat, potentiellement décisive lors de l’élection générale de novembre, pourrait percevoir un abandon de Sanders comme une trahison.
Selon toute vraisemblance, Bernie Sanders restera donc en lice jusqu’à la convention. Reste à savoir quelle stratégie il adoptera au cours des prochaines semaines : continuer à attaquer durement Hillary Clinton (sur ses liens avec Wall Street, son vote en faveur de la guerre en Irak) ou préparer le rassemblement derrière la candidate probable du parti démocrate ? L’ancienne secrétaire d’Etat, elle, semble définitivement tournée vers l’élection de novembre. Selon le New York Times, son équipe aurait d’ailleurs entamé ces derniers jours le processus de présélection des candidats à la vice-présidence, susceptibles de former avec Hillary Clinton le ticket démocrate.