Il y a de nombreuses leçons à tirer, pour les Européens, d’une possible victoire de l’extrême droite en Autriche ce dimanche. La première, c’est que les incantations et les incessants rappels aux «heures les plus sombres de l’Histoire» n’ont plus d’effet sur les électeurs. En 1999, l’entrée du FPÖ au gouvernement avait valu à Vienne de subir des leçons de démocratie et plusieurs mois de sanctions diplomatiques de la part de l’Union européenne. Le rappel à l’ordre était nécessaire, mais un peu vain : dix-sept ans plus tard, le FPÖ est plus fort que jamais. La glissade des électeurs européens vers des partis populistes et d’extrême droite ne cachant plus leur haine des immigrés, de l’islam, etc. s’accélère aussi de part et d’autre des Alpes. En France, par exemple, où tous les fronts anti-FN (qu’ils s’appellent «républicain» ou qu’ils portent des «non» en bandoulière) n’ont pas empêché les Le Pen de s’incruster et de gangrener les discours. Le 21 avril autrichien doit aussi rappeler à tous que les lois copiées-collées des thèses populistes ne ramènent pas les électeurs à la maison, mais donnent de la crédibilité à l’adversaire. Ce fut le cas avec la très dure loi sur l’immigration votée récemment par la coalition autrichienne. La participation au pouvoir des partis d’extrême droite ne vaccine pas non plus les électeurs : ils sont désormais capables de les faire gagner lors d’un scrutin majoritaire. Il ne faut pas pour autant se résoudre à la victoire électorale de l’extrême droite, ni même à sa victoire idéologique. Mais pour lui barrer la route, il faudra plus que des incantations. Elles ne fonctionnent plus et retardent l’entrée dans les vrais combats. En voici deux, forcément liés. Un : les partis de gouvernement, de droite comme sociaux-démocrates, éparpillés façon puzzle, doivent faire au plus vite leur examen de conscience idéologique et réapprendre à parler d’avenir à leurs concitoyens. Deux : l’Europe doit trouver son modèle de solidarité et de gouvernance, mis à mal par les crises économiques et la question des réfugiés (ou bien en est-il la cause ?). Il y a urgence, et pas qu’à Vienne.