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Affaire Baupin, tuto gynéco, offensive anti-IVG : mai dans la vie des femmes

Un mois dans la vie des femmesdossier
En mai 2016, dans la vie des femmes. (Montage DR)
publié le 1er juin 2016 à 12h36

Chaque mois, Libération fait le point sur les histoires qui ont fait l'actualité des femmes, de leur santé, leurs libertés et leurs droits. Neuvième épisode : mai 2016. Si vous avez manqué l'épisode précédent, il est ici (et tous les autres sont là).

Tiens, voilà du Baupin. Doit-on, pour commencer, revenir sur l'affaire Denis Baupin, tant discutée ce mois-ci ? Il semble difficile de s'en passer. On résume : l'ancien vice-président de l'Assemblée nationale et député écologiste Denis Baupin a démissionné après avoir été accusé par plusieurs femmes d'avoir eu à leur égard des comportements sexistes et agressifs (et avant qu'une enquête préliminaire soit ouverte). Non, pas seulement «goujat» ni «un peu limite» et encore moins du «marivaudage», mais bien souvent du type qui se règle au tribunal. Si la présomption d'innocence prime, on peut se féliciter de cette libération de la parole, qui contribue à faire changer la honte de camp et éviter à l'avenir que de tels comportements soient balayés comme des restes sans grande importance d'une culture française prétendument «portée sur la chose». Car il n'est nullement ici question de sexe ou de sexualité, mais de violence.

Avec cette nouvelle affaire, qui ne concerne du reste pas que la classe politique, on comprend qu'en cinq ans, depuis l'affaire DSK, les choses ont un peu bougé. D'abord, cette fois-ci, la parole des femmes qui ont témoigné a moins été remise en question (rappelez-vous ce que s'est pris Nafissatou Diallo sur le mode «elle n'est pas crédible parce que…») qu'il y a cinq ans. Ensuite, des hommes ont fini par comprendre que ces affaires étaient aussi les leurs, pas seulement des «histoires de bonne femme» ni des histoires dont il convenait presque de se moquer. Ou simplement de taire. Mais, pas de triomphalisme, l'affaire Baupin a encore charrié son lot de sexisme. En plus d'essuyer de nombreuses blagues grasses (la dernière dans la sphère politique serait : «Je vais te faire une Baupin»), de nombreuses femmes politiques, dont 17 ex-ministres ont lancé un appel contre le sexisme dans la foulée de l'affaire, ont été moquées, comme Cécile Duflot ou Christine Boutin (qu'on aurait jamais cru devoir défendre un jour) sur le mode : «celle-là, elle est trop moche/trop grosse pour être harcelée, ha ha ha». Qu'est-ce qu'on se marre.

L’argent, nerf de la guerre (des sexes)

Violences. On se déplace de 1 777 kilomètres pour se rendre en Roumanie, où le village de Concesti accueille depuis la fin de l'année dernière gratuitement des femmes battues et leurs enfants. Un quart des Roumaines ont été victimes de violences conjugales en 2015, et très peu d'entre elles osent porter plainte. D'autant qu'avec un salaire moyen de moins de 500 euros, il est difficile de quitter le domicile conjugal pour s'installer seule. Des problèmes d'argent qui plombent la vie familiale, c'est aussi le lot de nombreuses ouvrières asiatiques. Une alliance internationale de syndicats a interrogé 251 employés des usines qui fournissent les vêtements à H&M au Cambodge et en Inde. Il s'avère que pour les ouvrières, tomber enceinte revient souvent à perdre son emploi, si bien que certaines préfèrent avorter.

Egalité salariale. Même lorsque leur situation financière n'est pas si dramatique, les femmes à travers le monde sont toujours moins bien payées, en moyenne, que les hommes. Alors qu'une étude suggère qu'on puisse l'expliquer par le fait que les femmes, dès la recherche d'emploi, sélectionneraient moins d'offres portant sur des jobs «compétitifs», des voix continuent de se lever pour réclamer l'égalité salariale. Comme celle de Cindy Lauper, interprète du célèbre Girls Just Want to Have Fun («les filles ne veulent que s'amuser»), qui a repris son tube lors d'une émission télé avec l'animateur anglais James Corden, le transformant en Girls Just Want Equal Pay («les filles veulent juste l'égalité salariale»).

Netflix. Une autre qui l'a ouvert pour être aussi bien payée que les hommes, c'est l'actrice Robin Wright, aka Madame Underwood dans la série House of Cards, (produite par Netflix), rejoignant ainsi le long cortège d'actrices (Julianne Moore, Jennifer Lawrence…) réclamant l'égalité côté rémunération. Lorsque Robin Wright a réalisé que son personnage était aussi populaire que celui de son mari de télé, a-t-elle raconté, elle a demandé à gagner autant d'argent que son interprète Kevin Spacey… menaçant le studio de rendre publique cette inégalité de traitement si elle n'obtenait pas gain de cause. You go, girl.

Cinéma : la parole se libère, les pratiques sexistes demeurent

Harcèlement. Chloë Sévigny a décidé de ne plus se taire. A la suite de plusieurs autres comédiennes, elle a dénoncé ce mois-ci des faits de harcèlement sexuel, dont elle aurait été victime pas moins de trois fois. L'actrice de Boy's don't cry a raconté au Guardian«J'ai fait quelques auditions pour de grands réalisateurs, des figures très mainstream, et ça a donné lieu à de très bizarres situations. L'un d'entre eux m'a carrément demandé : "Que faites vous après l'audition ?", ce qui est totalement inapproprié… évidemment, je savais ce qu'il avait en tête. Un autre m'a directement emmenée dans une boutique et m'a fait essayer des fringues. […] Je ne sais pas si d'autres actrices sont capables de faire ci ou ça si on leur demande, mais si c'est le cas, je suis sincèrement désolée pour elles. Au cours des shoots de mode et des castings de films, sur le tournage ou n'importe quand, les hommes vous font tout le temps des avances…Toutes sortes d'actes inappropriés, et vous ne savez pas du tout comment vous en protéger».

Croisette. A l'occasion du Festival de Cannes, une série de conférences sur la place et le statut des femmes dans cette industrie a eu lieu. Mais, comme l'a remarqué notre journaliste sur place, très peu d'hommes étaient présents. En revanche, Geena Davis, Susan Sarandon ou encore Juliette Binoche en étaient. On vous raconte tout ici.

Costard. Le festoche sur la Croisette (on prend nos aises), c'est aussi synonymes de palanquées de réflexions sur les tenues des actrices, sur et hors tapis rouge. La page Facebook du show québécois Les brutes s'est amusé à recréer des fausses unes de presse mettant en scène des hommes en costard. Pour montrer à quel point ce genre de remarques est absurde.

Capture d’écran de la page Facebook lesbrutesetlequebec. DR

«Cannes est à nous !» On ne pouvait pas clore cette parenthèse cannoise sans évoquer le discours badass de Houda Benyamina, lauréate de la Caméra d'Or pour son premier film Divines. «Cannes nous appartient, Cannes est à nous !» s'est félicitée la réalisatrice franco-marocaine, fondatrice de l'association 1000 Visages, pour que «le cinéma français ne reste pas un ghetto». «Il faut mettre beaucoup plus de femmes aux postes décisionnaires. Des femmes! Des femmes!», a-t-elle réclamé, avant de lancer à Édouard Waintrop, délégué général de la Quinzaine des réalisateurs un «T'as du clito!», en référence à la réplique déjà culte de son film - et qu'on ferait bien de tous adopter.

Trop grosse, trop lesbienne, trop dénudée, pas assez voilée… l’image des femmes sans cesse contrôlée

Grossophobie. L'été dernier, Instagram censurait le hashtag #curvy, brandi par des femmes grosses et bien dans leur peau. Ce mois-ci, Facebook a retiré une photo de la mannequin grande taille Tess Holliday en bikini, la jugeant contraire à sa politique en matière de «forme et de santé» (sic). Ironie de l'histoire, le cliché avait été choisi par un groupe féministe pour promouvoir un événement sur l'acceptation de toutes les morphologies. Le réseau social a fini par faire marche arrière, et a remis en ligne la photo incriminée.

Capture d’écran de la photo supprimée par Facebook. DR

«Culture anti-islamique». En Iran, les autorités sont en guerre contre les femmes non voilées sur Instagram. Huit personnes du milieu de la mode, dont des mannequins, ont été arrêtées, accusées de propagation de «culture anti-islamique» pour avoir publié des photos de femmes tête nue sur le réseau social, très populaire dans le pays. Le voile islamique est obligatoire en Iran depuis la Révolution islamique de 1979. Une jeune femme iranienne, qui n'a pas révélé son identité, a d'ailleurs décidé de braver cet interdit, en sortant dans la rue, sans voile, le crâne rasé. «Ceux qui me disent de me couvrir les cheveux n'ont plus aucune raison de m'arrêter à présent», écrit-elle sur le groupe Facebook de «My Stealthy Freedom», sur lequel des Iraniennes dévoilent leurs cheveux.

Capture d’écran du post Facebook d’une jeune femme iranienne qui s’est rasé la tête. DR

Famille homoparentale. On a vu ce mois-ci la campagne d'Apple pour la Fête des mères. Mettant en scène des clichés de femmes enceintes, de mères donnant le bain à leur enfant ou se promenant avec lui, envoyés par les internautes, la campagne voulait célébrer la maternité. Sauf qu'un couple de femmes a été censuré de la version française du clip, qui ne laisse voir qu'une des deux mères avec l'enfant, sans que l'on ne sache très bien pourquoi la V.O. posait problème. D'autant qu'elles figurent bien dans des versions diffusées à l'étranger. L'occasion, d'ailleurs, de rappeler qu'en France, les couples lesbiens n'ont toujours pas accès à la procréation médicalement assistée, bien qu'ils l'aient encore réclamé lors d'une manifestation en mai.

Insultes de rue. On a l'impression d'en parler tous les mois. Cette fois-ci, c'est une étude de l'Ined qui a montré comment l'invective sexiste dans l'espace public variait selon l'âge et le sexe. «Salope», «pute», «connasse»… sont le lot quasi-quotidien de nombreuses femmes, décidemment jamais «assez comme il faut» pour occuper tranquillement l'espace public. D'ailleurs, un groupe sud-africain, Batuk, a décidé de lutter contre ces insultes de rue, en sortant le clip Puta (doit-on traduire ?), expliquant : «Puta […] est un gros cris de rage contre les pervers et les tyrans misogynes. […]  Puta est une protestation contre ceux qui harcèlent et insultent les femmes.» On vous laisse écouter :

Emoji. Après ça, il faut se réfugier dans un monde virtuel pour entendre enfin une bonne nouvelle. Ca a peut-être l'air anodin, mais Google va proposer 13 nouveaux emojis représentant des femmes au travail du médecin à la scientifique (jusqu'ici, le boulot concernait surtout, dans l'univers de ces petits personnages, les hommes). Une innovation dont on peut se réjouir, surtout au vu de leur fréquence d'utilisation chez les adolescents.

«La fin de la culture du viol», pas pour demain

Viol collectif. Au Brésil, le viol collectif d'une jeune fille de 16 ans a mis le pays en émoi. L'adolescente, victime d'un acte de vengeance par son ex-petit ami, a été droguée et violée par une trentaine d'hommes. Une vidéo, filmée par les agresseurs, a ensuite été mise en ligne, provoquant une mobilisation de la population pour réclamer «la fin de la culture du viol». Le nombre de viols dans le pays pourrait dépasser les 500 000 par an, selon une ONG.

Des Brésiliens manifestent devant l’Assemblée à Rio après le viol collectif d’une jeune femme. Photo Vanderlei Almeida. AFP

Militaires. Aux Etats-Unis aussi, il reste du boulot pour lutter contre les viols, en particulier au sein de l'armée. Un rapport de l'association Human Rights Watch (à lire intégralement ici) dénonce le traitement des victimes, hommes et femmes, de telles agressions, par l'armée, qui préfère encore trop souvent renvoyer à la vie civile le/ la soldat(e) victime plutôt que son/ses agresseur(s).

Contraception : du mieux en France, du moins bien aux Etats-Unis

Pilule du lendemain. Sur le front de la contraception, les nouvelles sont bonnes en France, mais pas outre-Atlantique. On commence par la bonne, qui concerne les adolescentes : il sera désormais plus simple de se faire délivrer la pilule du lendemain dans les collèges et les lycées puisque la condition de «détresse» jusqu'ici exigée par la loi a été supprimée. Depuis 2012, elle était déjà disponible gratuitement dans les universités. On rappelle à cette occasion que la pilule dite «du lendemain» fonctionne jusqu'à trois jours après le rapport sexuel non protégé, cinq pour la pilule dite «du surlendemain». Même s'il vaut mieux ne pas trop attendre, l'efficacité de ces médicaments d'urgence décroissant avec les heures.

Tuto gynéco. Autre excellente nouvelle pour les femmes francophones : le médecin Martin Winckler, qui officiait déjà sur son site, une mine d'infos - a lancé en mai une chaine YouTube où il parle gynécologie avec pédagogie. Contraception (pilule, stérilet, implant…), hormones, consentement lors des examens… le médecin évoque n'importe quel sujet, sans tabou et avec l'esprit bien plus ouvert que nombre d'autres praticiens, pour permettre aux femmes de faire leurs propres choix. Un discours qui fait du bien et des informations qui libèrent, c'est par ici que ça se passe.

(Wild wild) Midwest. Les nouvelles se gâtent, en revanche, dans le Missouri et l'Oklahoma, deux Etats du Midwest nord-américain. Dans le premier, une offensive législative des conservateurs, menée notamment depuis janvier, a abouti à la fermeture d'un centre de santé où étaient pratiqués des avortements, et à la suspension d'une enveloppe budgétaire fédérale de 8 millions de dollars destinée aux centres de planification familiale (lire le reportage de notre envoyé spécial sur place Matthieu Ecoiffier). Dans l'Etat voisin, les législateurs ont décidé de punir de jusqu'à trois ans de prison les médecins qui pratiqueraient des avortements. La gouverneure de l'Oklahoma Mary Fallin a mis son véto à cette mesure remettant en cause le droit à l'IVG, mais pas par soutien au libre choix (elle est contre). Selon elle, le texte n'était pas assez clair sur les conditions dans lesquelles la vie d'une mère serait en danger et autoriserait donc le médecin à procéder à une IVG. Il y a donc tout à parier que le texte, qui est passé par 33 voix contre seulement 12, sera présenté sous une autre forme.

Cachez ce droit que je ne saurais reconnaître. Au même moment que ces offensives anti-IVG, la Cour suprême américaine a joué les poules mouillées. La haute cour devait rendre une décision dans une affaire opposant le gouvernement à des organisations religieuses, lesquelles ne souhaitaient pas voir prise en charge la contraception garantie par l'Obamacare. Elle a finalement choisi de renvoyer cette affaire à une juridiction inférieure… et de s'en laver les mains (lire le récit complet ici).

Taxe tampon. Pour clôre le chapitre utérus, signalons tout de même qu'après le Massachusetts, le New Jersey et la Pennsylvanie, le Sénat de l'Etat de New York a adopté à l'unanimité la suppression de la taxe (de 4%) sur les protections périodiques. Ce vote doit encore être ratifié par le gouverneur (qui est pour).

Des publicités, du sexisme, et du marketing

Culottes. On doit l'avouer, et on est bien embêtées : alors que les critiques pleuvent sur la publicité pour les culottes Dim, de et avec Frédéric Beigbeder, accusée à peu près unanimement d'être sexiste, les rédactrices de cet article sont divisées sur le sujet. L'une est d'accord avec la position de l'écrivaine Camille Laurens, qui dénonce notamment comment, en mettant la femme de la pub en position de faire des activités traditionnellement «masculines», comme le jardinage, le publicitaire se protège des accusations de sexisme (loupé). L'autre n'a pas bondi de son canapé à la vision de cette pub (montrer une petite culotte pour vendre… une petite culotte serait plutôt un progrès), et se demande en revanche qui serait prête à acheter un slip simplement parce que Beigbeder se paye son petit fantasme à la télé (mais c'est une affaire de goût). Bref, sur ce coup, on vous laisse juge (et on vous propose de regarder sa parodie, qui met tout le monde d'accord).

Déo. Et vous savez sur quoi on est pas (totalement) d'accord non plus ? Sur une autre publicité, pour un déodorant cette fois. Relevée par le site Cheek Magazine, elle met en scène une jeune femme qui s'apprête à proposer à son copain de l'épouser. Du coup elle transpire mais elle a du déo donc ça ne se voit pas. Si l'on ne peut que se réjouir que le cliché de la demande en mariage soit inversé, qu'une femme soit fièrement montrée en train d'accomplir une tâche traditionnellement réservée aux hommes (quoi qu'il faille d'une part s'en remettre - ce n'est pas nouveau - et que d'autre part personne ne devrait jamais avoir à mettre un genou à terre…), il faut quand même pointer l'opportunisme du marketing de cette campagne. Utiliser un mouvement de libération pour vendre une société de consommation reste plutôt ironique.

Jeu, set et Match. Après avoir dévoilé les «jambes» des présentatrices télé, Paris Match en a remis une couche en mai dans la mise en scène sexiste avec une série de photos kitschissime de journalistes sportives, présentées en talons hauts, robes longues et décolletés plongeants - une scénographique qui les réduit à une «fonction décorative», comme le note le rédacteur en chef des Cahiers du football Jérôme Latta sur son blog, alors qu'elles ont fait leurs preuves dans le métier. Interrogées par Buzzfeed, trois d'entre elles déplorent des photos «de mauvais goût et incroyablement sexistes»… mais sous couvert d'anonymat.

Quelques jours plus tard, on a cru s'étranger quand on est tombé sur un diaporama, publié sur le site internet du même Paris Match, consacré… aux «plus belles femmes de joueurs» de l'Euro 2016. Elles sont finalement devenues les «plus célèbres», relève Les Nouvelles News. Ce qui n'empêche pas de les identifier uniquement par leurs statuts de «femme de».

Bac L. Celles qui pourraient gagner en visibilité et être considérées à leur juste valeur, ce sont les femmes auteures. Alors qu'aucune d'entre elles n'a jamais figuré au programme du bac littéraire, Najat Vallaud-Belkacem a promis que les choses allaient changer : «Je souhaite que désormais la place respective des auteures et des auteurs soit ajoutée aux critères de choix des œuvres afin que les œuvres des auteures femmes puissent être étudiées», a réagi la ministre de l'Education sur le site Change.org, qui héberge une pétition dénonçant l'absence de Marguerite Yourcenar, Simone de Beauvoir ou Nathalie Sarraute dans la liste des écrivains étudiés par les bacheliers.

Comment les corps des femmes (et des fillettes) sont soumis à des normes absurdes

Talons. On termine sur une note plus légère (quoique), avec le combat d'une salariée britannique, virée… parce qu'elle refusait de porter des talons au bureau. Nicola Thorp a lancé une pétition, pour que les entreprises du Royaume-Uni ne puissent plus réclamer un tel dress code, «obsolète et sexiste» selon elle. Le texte a rassemblé plus de 140 000 signatures, et a donné une idée au magazine Stylist UK : «Pour montrer à quel point [obliger des femmes à porter des hauts talons au travail] est absurde», la rédaction a proposé à ses salariés hommes de porter des escarpins pendant une journée. «Je me répétais "ne trébuche pas, ne trébuche pas […]. Ça ne m'est jamais arrivé de devoir penser à ça en allant en réunion"», a réagi l'un des bénévoles.

XL. C'est un peu le même type de discours qu'on a entendu aux Etats-Unis ce mois-ci quand Benjamin Cooper, un jeune homme vivant en Pennsylvannie, a décidé d'aider sa petite amie à trier sa garde-robe. Lui fait une taille S à M et a essayé quelques fringues de son amie, taillées XL. Or, les vêtements lui aillaient. Ce qui l'a poussé à écrire un post sur Facebook dénonçant le body-shaming dont les femmes font l'objet (capture ci-dessous) : «Je ne suis pas un homme très gros, et, plus important, une femme de ma corpulence n'est PAS une femme très grosse. Cette connerie est la raison pour laquelle nous avons des enfants de 8 ans qui ont des problèmes alimentaires. Cette connerie juste là est la raison pour laquelle des hommes crient "sale grosse vache !" à des femmes rondes dans les rues. C'est la raison pour laquelle les hommes qui pensent que le sexisme est un "mythe" répandu par des féministes de gauche ne disent que De. La. Merde. Merde au body shaming»

Fillettes. Même les petites filles sont soumises à ce body shaming. Une mère de famille, connue sous le pseudo de Sacripanne, a expliqué dans un post de blog comment les vêtements taille 3 ans (TROIS ANS !) des enfants sont déjà coupés de façon différente, les versions féminines étant plus petites et cintrées. Nous reproduisons ici la photo qu'elle a postée de deux vêtements de cette taille (le rose est version fille, le bleu celle prévue pour les garçons). N'hésitez pas à aller faire un tour sur son blog, où elle raconte comment elle s'est aperçue que les tailles étaient différentes. Même constat sur le blog de Sophie Gourion, qui s'agace elle aussi de la façon que notre société à d'inculquer aux filles le contrôle de leurs corps (et l'injonction à la minceur) dès le plus jeune âge.

A lire ailleurs : une sélection mensuelle d’articles lus et d’émissions vues/entendues ailleurs que dans «Libé»

Nous vous proposons, chaque mois, une sélection d’articles et de reportages repérés ailleurs dans la presse, à la radio, à la télé et sur le Web.

Poils. Elle a passé des années à traquer le moindre duvet, à se faire culpabiliser par des esthéticienne et à dépenser un SMIC en cire et autres crèmes dépilatoires. «Je réalise, aujourd'hui, que je ne m'étais tout simplement pas posé la bonne question, écrit Marie Kirschen dans un article publié sur Buzzfeed France. Plutôt que "quelle technique choisir ?", j'aurais tout simplement dû me demander : "Tous ces embêtements sont-ils réellement nécessaires ?"» Sortir avec des filles lui a permis d'avoir un «rapport plus décontracté à la question pileuse», comme elle dit. Son article, intitulé Comment j'ai appris à faire la paix avec mes poils, est à lire ici.

Trans. Est-ce que les hommes transgenres ont une perception du sexisme que les femmes n'ont pas ? Oui, répond (en anglais) un article du Time, qui raconte comme des hommes nés dans des corps féminins sont en mesure de perçevoir des discriminations sexistes que les femmes ne relèvent pas, s'aperçevant une fois leur transition réalisée qu'ils sont traités bien différemment que lorsque le monde les percevait comme des femmes.

Dessins animés. Et ces différences de traitement commencent tôt. La blogueuse Rivka. S a passé cinq heures devant Gulli, pour comprendre les représentations de genre véhiculés par la chaîne pour enfants, des spots publicitaires hyper-genrés aux dessins animés. Dans ces derniers, les personnages féminins sont souvent ramenés à des stéréotypes sexistes et tournés en dérision, analyse-t-elle dans un post pubié sur le site «Le cinéma est politique».

Brésil. Rue89 raconte comment les Brésiliennes ont réagi à un article présentant l'épouse de leur président par interim comme une femme parfaite, sous prétexte qu'elle reste au foyer. Une grosse campagne sur les réseaux sociaux s'est mise en place, et c'est à lire ici.

Militantisme. Prises de parole plus favorables aux hommes, remarques sexistes, agressions sexuelles… Slate revient longuement sur le sexisme au sein de Nuit Debout. Car place de la République aussi, les femmes sont régulièrement confrontées à la misogynie, une situation contre laquelle essaye de lutter la commission Féminismes. Ca se passe ici.

Film. Par ailleurs, relayons le petit film réalisé sur l'appli Snapchat par deux comédiennes, dans lequel elles dénoncent les clichés sexistes en incarnant tour à tour des femmes qui racontent vraiment… n'importe quoi sur les violences faites aux femmes. C'est plutôt drôle, surtout qu'elles ont utilisé presque tous les filtres qu'offre l'application pour jouer ces différents personnages (mention spéciale à la végétarienne).

Kiosque. Enfin, un petit mot de Porntoshop, magazine politique, érotique et féministe, qui a sorti son deuxième numéro. La fondatrice du projet a expliqué dans un mail à Libération : «Dans ce numéro, j'ai mis en regard des photos de femmes portant des masques des présidents de la Ve République et des citations misogynes de chacun de ces présidents. L'idée est à la fois de pointer le machisme des hommes politiques, mais aussi de faire entrer le corps de la femme à l'Elysée, alors que les caractères dits féminins sont rarement associés au pouvoir. Je cherche aussi, très volontairement, à faire des images qui accrochent le regard, ça éveille l'intérêt et ça permet, notamment lors des collages, de lancer beaucoup d'échanges avec les passants surpris.» On vous recommande d'y jeter un oeil (au moins).

Un des montages proposé par «Porntoshop», numéro 2. DR

(1) On plaisante, on n'ira pas jusque là.