Et si le résultat du référendum sur l’Union européenne ne tenait qu’à un cheveu ? Celui doré, indiscipliné mais peut-être aussi teint, de Boris Johnson. La campagne pour le référendum du 23 juin sur l’avenir du Royaume-Uni a pris un tour inattendu avec l’extraordinaire révélation que l’ex- maire de Londres, célèbre dans le monde entier pour sa toison d’or, aurait recours à des artifices chimiques pour maintenir son blond étincelant. Après tout, pourquoi pas un casque doré en guise de signature visuelle ? Donald Trump a bien choisi l’autobronzant.
Sauf que Boris Johnson a catégoriquement démenti se teindre les cheveux et que sa femme a juré sur sa tête et celle de ses enfants que le blond Johnson était totalement naturel. Le malentendu est né d'une tentative étudiée de se positionner en futur Premier ministre. En donnant une longue et sérieuse interview au Sunday Times, Boris Johnson, figure de proue de la campagne en faveur du Brexit, souhaitait faire oublier l'image de bouffon qui le suit. Mais lorsque le journaliste Tim Shipman lui a demandé s'il se teignait les cheveux, il s'est fendu d'un «oui» qui, affirme-t-il aujourd'hui, n'était que l'une de ses innombrables boutades. Ou comment ruiner un effort de communication par une saillie de trop.
«Blague». L'incident intervient à un moment clé de la campagne. Alors que les sondages sont de plus en plus serrés, que certains donnent même l'avantage au «Leave», le camp du «Remain», qui souhaite rester dans l'UE et se montre de plus en plus nerveux, a décidé de concentrer ses attaques sur Johnson. Son intégrité est ainsi régulièrement remise en cause. Amber Rudd, députée conservatrice en faveur du «Remain», l'a ainsi crucifié lors d'un débat télévisé, en expliquant que la seule compétence de l'ancien maire de Londres était de savoir faire «une bonne blague».
Depuis sa décision, tardive, de soutenir le camp du Brexit, Johnson est soupçonné de n’être motivé que par son intérêt personnel, dans l’espoir de succéder à David Cameron à la tête du parti conservateur et au 10, Downing Street. Il a d’ailleurs reconnu avoir consulté un député conservateur pour le sonder sur le nombre de ses collègues prêts à signer une lettre signalant leur manque de confiance en Cameron. Si 50 députés conservateurs (sur 330 au parlement) signaient une telle lettre, une procédure de destitution du chef des Tories pourrait être enclenchée. On n’en est pas là, mais le fait qu’il se soit renseigné témoigne de ses ambitions. Si le Royaume-Uni choisit de quitter l’Union européenne le 23 juin, le maintien de Cameron - qui prône le maintien - à la tête du gouvernement et du parti est peu vraisemblable.
Horrifiés. Au cours de la campagne, Johnson a choqué en affirmant que l'UE et Hitler avaient les mêmes objectifs. Ou en estimant que le soutien de Barack Obama au maintien était dicté par ses origines kényanes et une forme de rejet de l'Empire britannique. Sans oublier l'allusion à Churchill, qui serait aujourd'hui un Brexiter, selon lui. Plusieurs conservateurs se sont dit horrifiés par ces déclarations. Sir Nicholas Soames, petit-fils de Winston Churchill, a notamment jugé «inconcevable» d'imaginer que son grand-père n'aurait pas soutenu le «in».
Incapable de résister au plaisir d’un bon mot, Johnson risque de passer à côté du message qu’il souhaite transmettre. Et de laisser l’impression que blaguer est ce qu’il fait de mieux. Pour diriger un parti et un gouvernement, cela risque de ne pas suffire.