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Libération

La Russie, l’autre pays du hooliganisme

Depuis l’éclatement de l’URSS, des groupes se sont constitués pour «soutenir» leur club en attaquant les supporteurs adverses.
publié le 12 juin 2016 à 20h31

En Russie, on parle, non sans une pointe de fierté, des «plus gros désordres de l'Euro 2016», auxquels a participé la plus «importante union internationale des hooligans russes» (Championat.com). C'est la crème de la crème, ceux qu'on appelle ici les supporteurs «hardcore» qui, dans un élan patriotique, se sont unis à Marseille pour casser de l'Anglais : la Gladiators Firm et les Aliens du Spartak Moscou, le Music Hall du Zenith Saint-Pétersbourg, les Sturdy Fighters du Torpedo Moscou, la Yaroslavka du CSKA Moscou.

Ces groupes soutiennent différents clubs et entretiennent des relations d'hostilité violente. Mais l'occasion était trop belle, soulignent les observateurs : montrer enfin la force russe aux «rois du hooliganisme» que sont les Britanniques et dont la culture est au fondement de l'okolofutbol russe, littéralement le «parafootball». En Russie, le hooliganisme a commencé à se développer dans sa forme contemporaine au milieu des années 90, après l'effondrement de l'URSS. Chaque club est soutenu par plusieurs groupes ou «firmes» de quelques dizaines de combattants, souvent de solides sportifs, boxeurs, karatékas et autres lutteurs, qui sont moins intéressés par ce qui se passe sur la pelouse que par leurs propres performances. C'est pourquoi, d'ailleurs, ils ne boivent pas la plupart du temps, mais se battent sobres et organisés, comme ont pu le constater les supporteurs anglais attaqués à Marseille. La dévotion à leur club se juge surtout à leur force de frappe dans les bastons contre les groupes adverses.

Si les mesures de sécurité sont toujours accrues autour des stades lors de grands matchs en Russie (cordons de police, interdiction de vente d’alcool et de bouteilles en verre dans le périmètre, fouilles minutieuses), les autorités russes n’ont commencé à avoir recours à des listes noires de supporteurs bannis des stades pour violences qu’en 2014. Et ce n’était pas faute de connaître leur identité, mais en vertu de complicités entre police et hooligans, assure-t-on dans le milieu sportif. Avec la Coupe du monde qui doit se dérouler en Russie en 2018, le ministère de l’Intérieur s’est pourtant résolu à serrer les vis. Les interpellations après des affrontements urbains entre hooligans commencent à être pratiquées, tandis qu’un nouveau projet de loi prévoit de systématiser les listes noires et de les rendre publiques.