Prudence et méfiance. Au moment où la saison de l’alpinisme, de la randonnée et des cueillettes bat son plein, les autorités japonaises invitent les marcheurs à la plus grande vigilance vis-à-vis des ours. Depuis le mois de mai, pas moins de quatre personnes ont été retrouvées mortes et plusieurs blessées après avoir rencontré ces mammifères sur leur chemin.

Vendredi, le corps gravement meurtri d’une personne non identifiée a été découvert dans une forêt montagneuse de Kazuno (préfecture d’Akita, nord de l’Archipel). Il s’agit vraisemblablement de Tsuwa Suzuki, une employée indépendante de Towada, (préfecture d’Aomori). D’après la police de Kazuno, la femme de 74 ans se serait rendue dans ce village pour de la cueillette de légumes et de fruits sauvages.

Entre avril et juin, de nombreux Japonais se rendent dans les forêts pour cueillir des pousses de bambou – également consommées par les ours – qu’ils cuisinent ensuite pour leur repas et c’est souvent à ce moment-là que les attaques interviennent. Le corps non identifié a été localisé à environ 200 mètres de l’automobile de Tsuwa Suzuki. Déjà le 30 mai, à moins d’un kilomètre du même endroit, le corps d’un homme de 65 ans avait trouvé. Les 21 et 22 mai, deux hommes sans vie, mutilés, avaient été repérés à environ 3 kilomètres de ces lieux.

Cité par le quotidien Mainichi Shimbun, le chercheur à l'Institut de recherche sur la forêt et les produits forestiers Naoki Onishi avance que cette série d'attaque mortelle dans la préfecture d'Akita pourrait être attribuée à un seul et même ours. «Comme les humains sont de grands mammifères, les ours noirs d'Asie ont tendance à ne pas les attaquer intentionnellement. Ils le font essentiellement pour se défendre. Il est nécessaire de recueillir des poils d'animaux laissés sur les lieux pour identifier l'agresseur.»

Des mères avec leurs petits ont été aperçus en mai à Iwate, Yamagata, Nagano et plusieurs autres préfectures du pays. Plusieurs cas de blessures ont été d'ailleurs comptabilisés. «Les femelles avec leurs petits sont particulièrement méfiantes vis-à-vis des humains et il y a des moments où même les chasseurs les trouvent ingérables», expliquait, vendredi au Yomiuri Shimbun, Yohei Sasaki, président de la fédération nationale des chasseurs Dainihon Ryoyukai. Même si ces mammifères restent d'une taille relativement petite, une «personne ordinaire serait sans défense contre leurs attaques», selon Sasaki.

D’habitude, ce sont les pénuries alimentaires qui sont à l’origine d’attaque. Les autorités alertent souvent à l’automne les habitants des communes proches des montagnes et des zones sauvages à redoubler de prudence. C’est l’époque où les ours, avant d’hiverner, gagnent les villages et les communes rurales en quête de nourriture et pour remédier à la pénurie de glands et des faînes (fruits du hêtre). L’automne dernier, les autorités de Monbetsu (préfecture de Hokkaido) ont abattu un ours de 400 kilos qui s’était approché des habitations et des champs. Mais ces dernières attaques semblent être dues à une abondance de faînes qui a favorisé la nutrition des mères et la survie des bébés ours.

Les ours noirs d’Asie font partie des espèces menacées d’extinction. Plusieurs organisations environnementalistes mènent actuellement des programmes pour les comptabiliser. L’ours brun est beaucoup moins menacé. Il y en aurait plusieurs milliers sur l’archipel, notamment dans la région d’Hokkaido. Les ours s’approchent également des habitations du fait que certaines zones reculées sont désertées par des populations vieillissantes. Dans tous les cas, le ministère de l’Environnement recommande de porter une cloche pour manifester sa présence auprès des ours et les faire fuir, de surveiller les empreintes au sol. Face à un ours, il conseille également de se retirer lentement, en regardant l’animal tout le temps, sans jamais lui tourner le dos.