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Libération

A Berlin, on reste «calme» et on continue

Angela Merkel «regrette» le départ de Londres, mais estime l’Europe «assez forte pour le surmonter».
publié le 24 juin 2016 à 20h21

Le Brexit est lourd de conséquences pour l'Allemagne, qui perd au sein des instances européennes un allié libéral à même de faire contrepoids face aux Français et aux Italiens, qui s'opposent souvent à Angela Merkel lors des interminables sommets européens. En amont, Berlin avait ainsi multiplié les mises en garde : «Dehors, c'est dehors», avait répété le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, prévenant les Britanniques qu'ils n'obtiendraient pas un statut de relations privilégiées avec l'UE équivalent à celui des Norvégiens ou des Suisses. Dramatisation qui s'est révélée vaine.

«Pas de réponse facile». Au lendemain du vote, Berlin a fait passer le message qu'il était urgent d'attendre : qu'il s'agisse des relations avec les Britanniques mais aussi (surtout) de la refondation du projet européen réclamé notamment à Paris. Le visage fermé, la chancelière Merkel a «regretté» vendredi le choix des Britanniques «de mettre un terme» à leur appartenance à l'UE. Reconnaissant, sans «tergiverser» qu'il s'agit là d'«une cassure pour l'Europe, une cassure pour la construction européenne», elle a affirmé dans cette courte déclaration qu'il n'y aurait « pas de réponse facile», tout en soulignant que l'Allemagne assumerait sa «responsabilité particulière» mais qu'il s'agissait d'abord d'apprécier «calmement» les conséquences du référendum.

Lundi, c'est à Berlin que se réuniront Merkel, Hollande et Renzi en prévision du conseil européen du lendemain. L'occasion de commencer à démontrer que «l'Europe est assez forte» pour surmonter cette épreuve, comme l'a affirmé la responsable la plus puissante de l'UE. Sans attendre, au sein même de son gouvernement, le vice-chancelier SPD, Sigmar Gabriel, a, lui, affirmé que l'Europe payait notamment le fait d'avoir privilégié la rigueur à l'emploi.

Avec le départ de la Grande-Bretagne, l’Allemagne, dont le poids économique au sein de l’UE, sera de fait plus important (à l’instar de celui de la France), voit partir un partenaire majeur, un des pays vers lequel elle exporte le plus (90 milliards d’euros en 2015). Le Brexit pourrait ainsi coûter jusqu’à 45 milliards d’euros d’ici 2017 à l’économie allemande, selon les calculs de la DZ Bank, qui n’écarte pas le risque d’une récession. 2 500 entreprises allemandes sont installées en Grande-Bretagne où elles emploient 370 000 salariés. L’effondrement de la Bourse de Francfort, qui a perdu 10 % en quelques heures à l’ouverture, est à la hauteur des inquiétudes des milieux d’affaires germaniques.

«Sous tension». Le Brexit va-t-il relancer le débat autour d'une réforme de l'UE en Allemagne ? «Beaucoup va dépendre de la réaction des marchés vendredi, estime Daniela Schwarzer, directrice du bureau berlinois du think tank transatlantique German Marshall Fund. Il n'y aura une intervention politique que si les marchés sont sous une tension extrême. Mais je ne crois pas à un débat sur la réforme des institutions venant de Paris ou de Berlin. Le calendrier est très défavorable. Les deux pays sont déjà sous tension à cause des élections de 2017 en France et en Allemagne.»