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Libération
Syrie

Comment l'EI a-t-il réussi à abattre un hélicoptère piloté par des Russes ?

L'attaque, qui a entraîné la mort de deux pilotes, montre la mobilité et la dangerosité de l'organisation Etat islamique, pourtant en recul.
L'appareil abattu par le groupe jihadiste. (Capture d'écran YouTube)
publié le 10 juillet 2016 à 16h13

Deux soldats russes ont été tués vendredi soir près de Palmyre, quand l'hélicoptère syrien qu'ils pilotaient a été abattu par l'organisation Etat islamique. Dans la vidéo de trente-sept secondes diffusée samedi par l'agence d'information de l'EI, Aamaq, on voit l'appareil voler bas dans le crépuscule du désert. Puis, touché par des tirs, il se brise en deux, virevolte puis chute en passant de justesse sous un autre hélicoptère qui l'accompagnait. Annoncée dans la nuit de vendredi à samedi sur le compte Twitter officiel de la Wilayat («province») de Homs, l'information, démentie dans un premier temps par la Russie, a été officiellement confirmée samedi soir par le ministère de la Défense à Moscou.

«Les pilotes-instructeurs Riafagat Khabibouline et Evguéni Dolguine effectuaient une mission sur un hélicoptère syrien Mi-25», quand l'organisation Etat islamique a lancé une offensive, assure un communiqué cité par les agences de presse russes. Qui ajoute que «l'hélicoptère a été pris sous le feu des terroristes et s'est écrasé sur le territoire contrôlé par l'armée gouvernementale syrienne. L'équipage est mort». Ces décès portent à douze le nombre de soldats russes tués en Syrie depuis octobre, date de l'intervention directe de Moscou sur le terrain pour soutenir le régime syrien en difficulté.

«Un point faible précis»

L'incident de Palmyre soulève deux questions délicates. La première concerne le pilotage direct par des militaires russes d'appareils de l'armée syrienne. Moscou précise bien leur qualité d'«instructeurs» : le but est de ne pas donner d'argument aux forces de la rébellion syrienne qui accusent régulièrement les Russes de participer aux bombardements aveugles sur des civils dans les régions d'Alep et d'Idlib. La seconde interrogation, plus embarrassante, est relative à la capacité de l'Etat islamique d'abattre un hélicoptère en vol dans une région où ses forces ont pourtant été chassées depuis mai.

«Le facteur hasard et-ou chance est à privilégier, dit à Libération Abdelnasser Ayed, ancien capitaine de l'armée de l'air syrienne, réfugié en France. Ces hélicoptères ont un point faible très précis situé dans l'hélice de la queue qui équilibre l'appareil. Il y a 1% de chances qu'un tir puisse l'atteindre, mais c'est probablement ce qui s'est passé. Avec une DCA de base, comme en possèdent la plupart des groupes armés en Syrie, les hommes de Daech ont dû mitrailler intensément en l'air pour atteindre la cible précise.»

«Forces très mobiles»

La présence des hommes de l'organisation jihadiste dans cette région et leur capacité à réaliser des coups d'éclat comme celui de samedi démontre que, quand bien même ils perdent du territoire, ils n'en demeurent pas moins dangereux. «Leurs forces sont très mobiles. Leurs commandos peuvent s'avancer et se retirer rapidement et ils parient sur la qualité de leurs combattants», affirme l'expert militaire syrien. Difficile, selon lui, d'avoir des informations précises sur leur nombre, leurs forces et leurs méthodes. «Même les Américains ou les Français n'arrivent pas vraiment à cerner leurs capacités.»