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Libération

Amnesty dénonce une prison secrète en Ukraine

publié le 21 juillet 2016 à 20h31

Régulièrement, les gardiens de prison venaient répéter à Kostantin Beskorovaynyi : «Tu n'existes pas. Nous n'avons même pas de budget pour te nourrir. Tu n'existes pas.» Sans avocat, coupé du monde extérieur, entassé dans une petite cellule à plusieurs, sans possibilité de promenade, Kostantin Beskorovaynyi a passé quinze mois dans une prison secrète.

«C'est un centre de détention arbitraire et clandestin, vraisemblablement situé dans les locaux des Services de sécurité d'Ukraine (SBU) à Kharkiv, dans le nord-est du pays», explique Denis Krivosheev, d'Amnesty International pour l'Europe et l'Asie centrale. Jeudi, il présentait à Kiev un rapport réalisé avec Human Rights Watch (HRW) sur les arrestations et détentions arbitraires et les cas de torture des deux côtés de la ligne de front du conflit dans le Donbass.

Kostantin Beskorovaynyi était un élu municipal communiste à Kostyantynivka, un temps bastion des forces prorusses et russes. Après la reprise de la ville par les forces ukrainiennes, il a été arrêté en novembre 2014 puis torturé. Il aurait avoué avoir voulu empoisonner le réseau d’eau de sa ville. Et n’est réapparu qu’en février 2016.

«Les autorités [prorusses]autoproclamées de Donetsk et Lougansk ont recours aux mêmes abus», confirme Tanya Lokshyna, de HRW. «La différence notable, c'est que les territoires séparatistes sont par définition des zones grises. A la différence de l'Ukraine, qui est un Etat de droit», rappelle Krasimir Yankov d'Amnesty.

D'après les ONG, jusqu'à 70 personnes ont été entassées dans cette prison secrète, au plus fort du conflit. «La majorité d'entre elles ont déjà fait l'objet d'échanges de prisonniers. Mais fin février, il y avait au moins 16 personnes toujours incarcérées», poursuit Yankov. Le procureur général ukrainien a assuré aux ONG qu'«une enquête était en cours concernant ces allégations de prisons secrètes».