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Les Allemands lassés par Merkel et son «nous y arriverons»

Les drames récents qui ont secoué le pays ont entraîné la chute de la chancelière dans les sondages.

Angela Merkel le 28 juillet, à Berlin. (Photo Hannibal Hanschke. Reuters)
ParNathalie Versieux
correspondante à Berlin
Publié le 05/08/2016 à 16h28

Angela Merkel a longtemps caracolé en tête des sondages. Elle n’est plus, aujourd’hui, qu’à la sixième place du hit-parade des politiciens allemands, loin derrière son ministre des Affaires étrangères, le social-démocrate Frank-Walter Steinmeier (première place avec 71% d’opinions positives). En un mois, la cote de popularité de la chancelière s’est effondrée, de 59% de satisfaits mi-juillet à 47% aujourd’hui.

En cause : sa politique d'asile généreuse, jugée responsable de l'insécurité croissante dans le pays depuis les quatre drames de la fin juillet. Deux attaques ont été revendiquées par l'organisation Etat islamique. Parmi les personnes interrogées pour le compte de la chaîne de télévision publique ARD, 65% disent «ne pas être satisfaits» ou «être très insatisfaits» de la politique d'asile du gouvernement fédéral. Seuls les sympathisants des Verts sont d'accord (à 60%) avec la ligne Merkel, ce qui laisse augurer une possible alliance entre ces derniers et l'Union chrétienne-démocrate d'Allemagne (CDU, le parti de la chancelière) au lendemain des prochaines élections. Parmi les électeurs de la CDU, 52% condamnent la politique de Merkel sur les réfugiés, ainsi que 62% de ceux du Parti social-démocrate d'Allemagne (SPD), 69% des adeptes du parti néocommuniste Die Linke («la Gauche») et 100% de ceux de l'Alternative pour l'Allemagne (AFD, extrême droite). Sa cote de popularité avait déjà connu une telle chute : en début d'année, après les agressions sexuelles de Cologne commises par plusieurs centaines d'hommes, majoritairement maghrébins.

Expulsions

En un mois, la cote de popularité du principal rival de la chancelière, le très conservateur ministre-président de la Bavière, Horst Seehofer, est passée de 33% à 44%. Il incarne la ligne dure, critique envers la politique d'asile menée par l'Allemagne depuis août et remet ouvertement en question le célèbre «nous y arriverons» lancé par Angela Merkel en août 2015, et qu'elle a répété lors de sa conférence de presse après les attentats.

La chute de la chancelière dans les sondages, à un peu plus d'un an des législatives de l'automne 2017, sème la panique dans les rangs de son parti. Nombre de députés, inquiets pour leur siège, réclament un changement de ligne : le fait qu'Angela Merkel persiste et signe avec son volontariste «nous y arriverons» «n'est pas très heureux», estime le député Karl-Georg Wellmann (CDU). Tout en soulignant que la chancelière en est elle-même consciente, comme le montre le paquet de réformes annoncées par le gouvernement : durcissement des expulsions, renforcement des effectifs de police…

«Provocation»

«De plus en plus de gens s'inquiètent et se demandent si nous allons vraiment réussir ce que nous devons réussir», constate pour sa part le représentant de l'aile droite de la CDU, Wolfgang Bosbach. Selon une autre grande pointure du parti, Peter Ramsauer, «lorsque la chancelière dit tenir à sa ligne du "nous y arriverons", beaucoup le prennent comme une provocation».

Angela Merkel, fidèle à sa stratégie du «communiquer peu», n'ira pas sur le ring. Le quotidien populaire Bild assure l'avoir vue incognito dans le sud du Tyrol italien, où elle se trouvait pendant quelques jours pour une randonnée avec son époux. Cette année, la chancellerie fera, plus que d'habitude, tout pour éviter les photos de vacances dans la presse allemande.