Les rebelles de Marea, une petite ville entre Alep et la frontière turque, n’en ont jamais douté : l’attaque au gaz moutarde du 21 août 2015 a été lancée par l’Etat islamique (EI). Ils en ont désormais la confirmation officielle. «[L’EI était] la seule entité à avoir les capacités, les motivations et les moyens d’utiliser du gaz moutarde à Marea [ce jour-là]», indique le rapport de l’ONU et de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, remis mercredi soir. A l’époque, des rebelles de l’Armée syrienne libre et d’Ahrar al-Sham, un groupe salafiste, tentaient de repousser les assauts de l’EI. La ville était presque encerclée. Les avions de la coalition n’intervenaient qu’épisodiquement, lorsque les jihadistes réussissaient à pénétrer dans la ville. Le jour de l’attaque, Marea a été visé par plus de 50 tirs d’obus, dont plusieurs chargés de gaz moutarde, depuis l’est et le sud-est de la ville, zone alors contrôlée par l’EI. D’après Moudar Nadjar, commandant militaire des rebelles du Front du Levant, l’agent chimique avait été récupéré par les jihadistes dans les stocks de l’armée syrienne lorsqu’ils s’étaient emparés de Palmyre, en mai 2015.
Le 24 août, vers 10 heures, l'un des obus atterrit sur la maison de la famille Lattouf. Les parents et leurs deux filles réussissent à rejoindre un hôpital de campagne géré par Médecins sans frontières (lire notre reportage du 10 septembre 2015). Ils souffrent de conjonctivite, ont des difficultés à respirer et des cloques se forment sur leurs corps. Les médecins décident de les évacuer dans des hôpitaux de Gaziantep, dans le sud de la Turquie. La fille aînée se rétablit en quelques jours. Les parents sont plus gravement atteints et placés dans des chambres stériles. La cadette, Sidra, âgée de quelques semaines, décédera deux semaines plus tard.