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Volte-face de Trump, sale semaine pour Clinton... une semaine d'élection américaine

Vous n'avez pas suivi la campagne américaine cette semaine ? On fait le point.

Lors d'une conférence de presse, Donald Trump a reconnu que Barack Obama était bien né aux Etats-Unis. (Photo Mandel Ngan. AFP)
ParBaptiste Bouthier
Kim Hullot-Guiot
Frédéric Autran
Correspondant à New York
Publié le 17/09/2016 à 9h52

En novembre, les électeurs américains devront choisir entre les deux principaux candidats pour la présidentielle américaine : Hillary Clinton côté démocrate, Donald Trump chez les républicains. Toutes les semaines, Libé fait le point sur la campagne.

Le billet d'Amérique

Trump clot son chapitre «birther» 

Il l'a dit avec l'aplomb et l'arrogance d'un homme qui ne doute de rien. Et surtout pas de lui-même. A 11h33 vendredi matin, Donald Trump a mis fin - en dix mots - à cinq ans d'abject mensonge. Son mensonge. «Le président Barack Obama est né aux Etats-Unis. Point final», a déclaré le candidat républicain, reconnaissant donc enfin la citoyenneté américaine de l'actuel président… entré à la Maison Blanche il y a sept ans et 240 jours ! Depuis des années, Donald Trump incarnait le mouvement des «birthers», ces extrémistes contestant le lieu de naissance - Hawaï - et la nationalité de Barack Obama. Et, par ricochet, la légitimité de son élection. «Je commence à penser qu'il n'est pas né ici», disait-il en 2011. Trois ans plus tard, le milliardaire invitait des hackers à «pirater le dossier universitaire d'Obama» pour vérifier son lieu de naissance.

Pour tenter de faire taire ces théories du complot, Barack Obama avait publié son acte de naissance dès juin 2008 - cinq mois avant son élection. Les rumeurs s'étaient poursuivies, propagées notamment par Donald Trump et nourries par le racisme d'une frange de la population n'ayant jamais digéré l'élection du premier président noir de l'histoire américaine. Au printemps 2011, la Maison Blanche avait bien tenté de publier une version plus détaillée du document. Sans plus de succès. A 52 jours de la présidentielle du 8 novembre, Donald Trump a décidé qu'il était temps de remiser cette absurde théorie du complot au placard. Il a convoqué la presse dans son nouvel hôtel de luxe à Washington, promettant une annonce majeure. Appâtées, les chaines d'information ont couvert l'événement en direct, et diffusé pendant plus de vingt minutes d'anciens militaires défilant au podium pour louer le leadership de Donald Trump. Lorsque ce dernier s'est enfin exprimé, il n'a parlé que quelques secondes et n'a répondu à aucune question, suscitant la colère des journalistes et des démocrates, sidérés par une telle légèreté.

«Ce que Trump vient de faire est une honte», a aussitôt réagi Hillary Clinton sur Twitter. Avant d'ajouter  : «Ce que Trump devrait faire : pour une fois dans sa vie, admettre ses erreurs. Présenter ses excuses au président et au peuple américain». Mais Donald Trump ne s'excuse pas. Jamais. En revanche, il ment. Très souvent. Hier, il a ainsi accusé l'équipe d'Hillary Clinton d'avoir lancé les rumeurs sur le lieu de naissance de Barack Obama lors des primaires démocrates de 2008. C'est évidemment faux mais Donald Trump n'en a cure. Car cette campagne l'a prouvé à maintes reprises : quoi qu'il dise, quoi qu'il fasse, ses partisans lui resteront fidèles. Et c'est cela qui le rend aussi dangereux.

Par Frédéric Autran Correspondant aux Etats-Unis

La chute de la semaine

Clinton, la série noire

Bon, clairement, c'était pas la semaine d'Hillary Clinton. Après avoir qualifié de «pitoyables» des électeurs de Donald Trump, sa plus grosse bourde de la campagne, la candidate démocrate a eu un malaise en pleine cérémonie de commémoration du 11-septembre, en fait dû (officiellement) à une pneumonie, qui a largement relancé les débats autour de son état de santé, sujet récurrent des républicains depuis sa commotion cérébrale de 2012.

Même si Donald Trump a pour une fois fait profil bas en ne sur-réagissant pas au malaise de son adversaire, la séquence a marqué un coup d'arrêt net dans la campagne d'Hillary Clinton. Conséquence logique, les derniers sondages donnent un resserrement net de la course à la Maison Blanche. Encore assez utopique la semaine dernière, l'hypothèse d'une victoire de Donald Trump le 8 novembre prochain a pris du corps. Référence en matière de projections électorales, le très sérieux site FiveThirtyEight considère ainsi la chose plausible, même si Hillary Clinton continue d'avoir environ deux chances sur trois de l'emporter, selon leur modèle statistique (trois sur quatre pour celui du New York Times). Néanmoins, le remake de la présidentielle de l'an 2000 pointe le bout de son nez : un scrutin qui voit le candidat démorate (Al Gore à l'époque) obtenir la majorité des suffrages à l'échelle nationale, mais le candidat républicain (George W. Bush) entrer à la Maison Blanche au jeu des grands électeurs.

Comme l'explique Nate Silver, le rédacteur en chef de FiveThirtyEight, la marge d'Hillary Clinton semble s'être considérablement réduite dans plusieurs Etats, qui deviennent de facto des «swing states» (susceptibles de voir les deux camps gagner) alors que certains, comme le Wisconsin, la Pennsylvanie ou le Michigan, ont toujours voté démocrate à la présidentielle depuis vingt ans. «La Floride, l'Ohio, la Caroline du Nord, l'Iowa et le Nevada vont se jouer à pile ou face, explique Nate Silver. Sans ces Etats, Clinton a 273 grands électeurs mais aucune marge de manœuvre [il en faut 270 pour gagner l'élection]. Si elle perd un Etat parmi le New Hampshire, la Pennsylvanie, le Wisconsin, le Michigan, le Colorado ou la Virginie, Trump est président.» Cela fait beaucoup de si alors qu'il reste deux mois de campagne et trois débats télévisés. Mais la brèche est là.

Le show de la semaine

Obama ravi d'être en campagne

Pas d'Hillary Clinton cette semaine ? Barack Obama à la rescousse ! Très engagé dans la campagne démocrate par peur de voir Donald Trump lui succéder à la Maison blanche, le président américain a démarré une série de meetings cette semaine, à Philadelphie. De toute évidence, l'exercice de la campagne électorale lui manquait : Obama a fait le show, fidèle à sa réputation, devant une assemblée conquise d'avance. On y a vu deux ou trois punchlines, notamment lorsqu'une spectatrice lui a crié que le prix de l'essence était très bas, à deux dollars le gallon. «Merci de me le rappeler ! Merci Obama !», lui a répondu tranquillou le président des Etats-Unis.

Le hashtag de la semaine

«Where is Melania ?», se demandent les Américains

Depuis qu'elle s'est ridiculisée, à la convention républicaine de Cleveland cet été, en prononçant un discours partiellement pompé sur un vieux speech de Michelle Obama, datant de 2008, Melania Trump a quasiment disparu des radars médiatiques. Habituellement, aux Etats-Unis, les épouses sont fort présentes dans les campagnes - bien plus que dans les campagnes françaises -, la «First lady» étant généralement très exposée durant le mandat de son époux. Au début de la campagne, d'ailleurs, Melania Trump a joué le jeu en apparaissant à plusieurs reprises à la télévision pour des interviews destinées à adoucir l'image et humaniser son candidat de mari.
Or, depuis deux mois, c'est rideau : à part une apparition dans le public d'un discours de Donald Trump sur la sécurité nationale, la semaine dernière à New York, et une autre, samedi dernier, aux obsèques d'une conservatrice américaine, Phyllis Schlafly, plus personne n'a vu Melania Trump. Au point qu'un hashtag a fait florès sur Twitter, #WhereIsMelania («Où est Melania ?»). Melania Trump a fini par répondre, le 10 septembre «Je profite de la vie et de ma famille et j'aime mon pays.» Aimer son pays serait donc une activité à temps plein...

Elle a, depuis, publié plusieurs tweets, notamment à l'occasion des commémorations du 11-Septembre, ou pour couper court aux polémiques sur les modalités de son arrivée, prétendument illégales, sur le territoire américain.

Pour aller plus loin…

Chaque semaine, nous vous proposons une sélection d’articles à lire en VO, pour s’immerger encore plus dans la campagne.

• C'est une des tendances surprise de la campagne : Donald Trump ne cesse de clamer son amour pour Vladimir Poutine, et ça a plutôt l'air de marcher auprès de ses électeurs. Thomas Friedman, éditorialiste au New York Times, décrypte ce «crush» pas banal.

• Sans généreux donateurs, aucune campagne présidentielle ne serait possible, et c'est particulièrement vrai aux Etats-Unis, où la course à la Maison blanche se joue à grandes valises de dollars. Le Washington Post dresse le portrait de l'une des principales mécènes de la campagne 2016 de Donald Trump, une certaine Rebekah Mercer, qui a dépensé des dizaines de millions de dollars pour le parti républicain ces dernières années.

• Comment les candidats, et les électeurs, devraient-il débattre, durant cette campagne ? C'est la question que pose le New Yorker cette semaine, revenant notamment sur l'histoire des débats télévisés entre les principaux candidats. Cette année, ils seront côte à côte, sur une scène, même si la chaîne qui le diffusera préfère parler «d'apparition conjointe» que de «débat».