Alors que le plus grand hopital d'Alep-Est est de nouveau bombardé ce samedi, on remarque ce tweet de l'agence de presse progouvernementale syrienne, Sana, posté en anglais le 24 septembre : «Alep, maintenant surnommée la "ville la plus dangereuse du monde", se flatte d'avoir une vie nocturne en plein essor, comme le montre l'un des événements de cet été».
Suit une vidéo d'1 minute 16, montrant une soirée de musique électronique, présenté comme ayant eu lieu le 16 juillet dernier à Alep. L'écart entre les images qui nous viennent tous les jours de Syrie, et en particulier d'Alep, deuxième ville du pays, classée au patrimoine de l'Unesco, divisée et meurtrie par des combats sans fin, est frappant. Sans quoi, on aurait même pas remarqué cette vidéo, qui réunit tous les canons du genre : DJ, éclairage soigné, convives, généralement vingtenaires ou trentenaires, souriants.
#Aleppo, now dubbed as the "World's Most Dangerous City", still boasts a thriving nightlife, as shown in one of this summer's events #Syria pic.twitter.com/kFUDtGvHME
— SANA English (@SANA_English) September 24, 2016
Le Washington Post, qui précise que seulement 30 médecins restent à Alep pour 250 000 habitants, rapporte que sa chef de bureau à Bagdad (Irak) s'est rendue au mois de mars dernier à Alep, où «elle a été témoin de scènes d'une surprenante banalité» : «Des pic-nics en famille avec des enfants qui font la queue pour acheter des ballons et du popcorn. Quelques kilomètres plus loin, dans un campus universitaire délabré, des milliers d'étudiants assistent à leurs cours. Dans le centre-ville, le cinéma de la ville passe les derniers films hollywoodiens. Le soir, les restaurants sont remplis, écrit-elle, Au café Foresta, dans le quartier aisé al-Azizia, le morceau de David Guetta, "No Money No Love" passe alors qu'Hadeel Kasabji, 25 ans, profite d'une soirée en famille. Elle dit que le manque d'électricité est une lutte.» Mais depuis le mois de mars, la crise à Alep s'est significativement intensifiée, précise le quotidien américain.
«Cette vidéo de boîte de nuit est une sorte de propagande cooptée par ceux qui aimeraient croire que le gouvernement syrien représente une vision de la libre, et même amusante, Syrie», décrypte encore le journal. En juillet, rappelle The Independent, le ministère du Tourisme avait déjà été critiqué pour avoir diffusé des vidéos «glamour» faisant la promotion des plages de Tartous.
Depuis le début du conflit, Alep est passé de 3 millions d'habitants à 250 000. La Grande-Bretagne et la France ont récemment dénoncé la commission en Syrie, notamment à Alep, de «crimes de guerre».