Plus de 140 personnes ont été tuées et 525 blessées samedi par une attaque aérienne à Sanaa, la capitale du Yémen, selon l'ONU. Les frappes ont visé une salle publique où une foule était réunie dans l’après-midi pour une cérémonie funéraire. Selon des habitants, le bâtiment s'est embrasé avant de s'effondrer.
Les rebelles houthis ont attribué ce «massacre» à la coalition dirigée par l'Arabie Saoudite, à laquelle participent une dizaine de pays arabes. Les Etats-Unis ont annoncé l'«examen immédiat» de leur soutien à Ryad dans cette guerre qui dure depuis dix-huit mois entre les rebelles chiites houthis, soutenus par l'Iran, et la coalition, alliée du gouvernement yéménite reconnu par la communauté internationale. La France, via un communiqué du Quai d'Orsay, se contentant de demander «une enquête indépendante pour identifier les auteurs de l'attaque» et souligne «l'urgence d'une solution politique».
L'Arabie Saoudite nie toute implication dans ces frappes, et assure être prête à associer Washington à une enquête «immédiate». Mais l'ancien président Ali Abdullah Saleh, allié des houthis et qui conserve une influence sur l'armée yéménite depuis son départ sous la pression de manifestations démocratiques dans la foulée du printemps arabe, a appelé dimanche à la télévision à la mobilisation à la frontière avec l'Arabie saoudite pour «venger» les victimes : «Le ministère de la Défense, l'état-major et le ministère de l'Intérieur doivent prendre les dispositions nécessaires pour accueillir les combattants sur les lignes de front à la frontière à Najrane, Jizane et Assir.»
Le maire parmi les victimes
Selon un photographe de l'AFP sur place, des équipes de secours ont retiré des corps calcinés et tenté d'extraire des personnes coincées sous les décombres. Certains blessés, amputés de leurs membres inférieurs par l'effondrement du bâtiment, ont été secourus par des volontaires. Des ambulances ont évacué les victimes et les hôpitaux ont lancé un appel pressant pour des dons de sang. «Un avion a tiré un missile contre la salle, et quelques minutes après, un deuxième appareil a bombardé le site», a indiqué un témoin. «C'est un crime contre l'humanité. […] Le régime saoudien est responsable de l'effusion de sang des Yéménites», a lancé un autre témoin.
Le maire de la capitale, Abdel Qader Hilal, figure parmi les morts, a indiqué la chaîne Al-Masirah. La cérémonie était organisée en hommage du père du général Jalal al-Rouichène, nommé ministre de l’Intérieur par le président Abd Rabbo Mansour Hadi mais resté en poste après la conquête de Sanaa par les rebelles en septembre 2014.
L'échec des pourparlers
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a exigé une enquête «rapide et impartiale» ainsi que la «traduction en justice des responsables». La coalition, qui est intervenue au Yémen en mars 2015, avait déjà été accusée par des organisations de défense des droits humains de toucher des secteurs civils dans ses raids. Mi-août, après l'échec de pourparlers de paix qui se tenaient au Koweït, au moins 14 personnes avaient été tuées dans des attaques touchant une école et des hôpitaux. Le 15 mars 2016, des raids aériens contre un marché dans la province de Hajja avaient fait au moins 119 morts selon l'Unicef, et un chef tribal proche des rebelles avait accusé la coalition. Selon l'ONU, le conflit au Yémen a déjà fait plus de 6700 morts.
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