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Libération
Éditorial

Trump, les femmes mariées et le cynisme des Républicains

Donald Trump salue ses partisans devant l'entrée de la Trump Tower, le 8 octobre à New York, peu après le scandale déclenché par les enregistrements dans lesquels il évoque son comportement avec les femmes de façon obscène. (Photo Spencer Platt. AFP)
publié le 9 octobre 2016 à 13h15

«En tant que père et mari…» Voilà comment certains membres haut placés dans l'establishment républicain ont expliqué ce week-end pourquoi ils désavouaient les propos de Trump, tirés d'une vidéo de 2005, justifiant des agressions sexuelles contre des femmes mariées.

Condamnations d’une sortie de trop ou tentatives désespérées de sauver les meubles ? Les deux, saupoudrées d’une bonne dose de cynisme. Car si les dégâts de cette vidéo éloignent un peu plus la possibilité d’une victoire républicaine à la présidentielle, ses effets collatéraux pourraient surtout se traduire par une perte de la majorité au Sénat, appelé à être renouvelé le même jour que l’élection présidentielle, le 8 novembre.

Pour le Grand Old Party, il faut sauver l’eau du bain et jeter le bébé. En commençant par colmater les fissures de la baignoire et en s’adressant au corps électoral majoritairement féminin. «En tant que père et mari», donc…

Mais en tant que responsables politiques, ces Républicains n’ont-ils donc rien eu à dire sur Trump, milliardaire pas si doué que ça en affaires, raciste, sexiste, machiste, harceleur, démagogique, menteur, ignorant, corrompu, instable, etc ?

Et en tant qu’êtres humains, ces Républicains n’ont-ils donc rien eu à dire sur Trump quand il s’en est pris aux musulmans, aux noirs, aux Mexicains, aux handicapés, aux pauvres, aux réfugiés syriens, aux anciens combattants, etc ?

Jusqu’à vendredi, le programme et l'attitude de Trump ne posaient manifestement aucun problème à un grand nombre de responsables républicains. A minima, ils pouvaient se satisfaire du «suprémacisme» blanc version Trump soutenu par le KKK s’ils parvenaient à pousser leur politique ultralibérale au Congrès. Trump élu ou pas, finalement, peu leur importait.

Mais la marionnette leur a échappé. Rattrapé par son passé et ses agressions, réelles ou fantasmées, de femmes mariées, sans doute blanches, il a attaqué le cœur de l'électorat républicain et conservateur. Malgré ses excuses et le soutien de la base des républicains, il a sans doute obéré ce week-end ses chances de succéder à Obama. Il a surtout achevé de faire exploser le parti républicain, qui va devoir justifier de son soutien —et de son lâchage— à un personnage que ses caciques font mine de découvrir à trente jours du vote. Et redéfinir les valeurs du parti de Lincoln. Etre père et mari ne suffira pas.