L'armada a quitté la pleine de Nawaran, dans le nord irakien. Des milliers de combattants kurdes qui avaient participé jeudi à l'offensive pour chasser Daech de plusieurs villages et s'approcher de Mossoul, il n'en reste que quelques centaines. La route qui part vers l'ouest et descend vers la capitale irakienne du «califat» de l'Etat islamique, à 17 kilomètres, n'est plus envahie de colonnes de chars et de blindés. Mais la bataille n'est pas finie, elle a simplement changé de forme.
Vendredi, les combattants kurdes ont commencé à pénétrer dans les villages repris à l'EI. Ils s'attendaient à des pièges et des assauts suicides. Ils ne s'étaient pas trompés. A Khorsabad, un village de quelques dizaines de maisons, ils ont essuyé, sur la seule journée de vendredi, 17 attaques à la voiture piégée. «Il reste encore des jihadistes là-bas, explique le colonel Jalal. Ils cachent les voitures dans des cours de maisons ou dans celles de bâtiments publics.»
Le peshmerga observe la plaine depuis un fortin qui la domine. Toutes les dix minutes environ, une explosion retentit. Elle est parfois puissante et longue, suivie d’une épaisse colonne de fumée noire: c’est un avion de la coalition qui vient de frapper une voiture piégée. Elle est parfois plus brève : une mine, déposée dans une maison ou un champ.
«Il y en a partout, dans quasiment chaque maison», dit un peshmerga posté à quelques centaines de mètres du hameau de Bakina. Les mines sont enfouies dans le sol, cachées derrière des portes. Il suffit de rompre un fil quasi invisible pour les déclencher. Un pick-up américain sort de Bakina à pleine vitesse. A l'arrière, deux blessés, dont l'un est inconscient. Les ambulances les emmènent, le pick-up repart immédiatement. Il est chargé d'hommes du génie. Ils n'ont aucun vêtement de protection, même pas un gilet pare-éclats.
«Tous les blessés que nous avons reçus depuis lundi l'ont été par des explosions, sauf un, touché par un tir de sniper», dit Kadir, un chirurgien qui assure des permanences dans l'hôpital de fortune situé à une dizaine de minutes du front, sur la route de Shiran. C'est dans ce «centre de triage primaire» que sont stabilisés les blessés avant d'être répartis dans les hôpitaux de la région. Trois hélicoptères postés sur la route qui mène à la ville se chargent d'emmener les cas les plus graves. Sur la seule journée de vendredi, 23 peshmergas ont été blessés et deux tués.