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Libération

Darfour : les internautes cartographient les crimes

publié le 26 octobre 2016 à 19h31

Le Darfour est peu à peu devenu une «boîte noire» pour les observateurs internationaux. En guerre depuis treize ans, cette région aride du Soudan traversée par plusieurs mouvements rebelles est dévastée par l’implacable répression menée par le régime de Khartoum et ses miliciens. Pour les ONG, les journalistes ou les chercheurs, il est extrêmement difficile de se rendre dans les zones de combat, le gouvernement en refusant l’accès.

Empêchée de circuler au sol, Amnesty International s'est tournée vers le ciel. Les satellites qui planent au-dessus de l'Afrique sont les témoins muets de la guerre qui déchire les villages du Darfour : il s'agit de les faire parler. Amnesty a utilisé la technique du crowdsourcing - la participation massive des internautes. A partir des images de Google Maps, client de l'opérateur satellitaire DigitalGlobe, 16 300 volontaires ont aidé à décortiquer 150 000 km2 de terrain. «Nous estimions qu'il allait falloir six semaines pour mener à bien le projet. En réalité ça a été plié en dix jours, raconte Aymeric Elluin, d'Amnesty France. C'est hallucinant pour nous. Ça nous aurait pris des années de faire le même boulot avec nos équipes.»

Les contributeurs devaient signaler les emplacements des villages et surtout des indices de destructions : incendies, ruines… Pour plus de fiabilité, chaque «carré» a été balayé par plusieurs personnes afin de croiser les informations. «Ce n'est qu'un premier filtre, précise Aymeric Elluin. Ensuite, des spécialistes vont travailler sur les zones signalées. Ils vont notamment comparer avec des images plus anciennes, pour identifier les dates de destruction.»

La carte du Darfour «décodée» ne sera pas publiée telle quelle afin d’empêcher qu’elle ne serve aux différentes parties du conflit. Mais elle pourra être partagée avec certaines organisations humanitaires. Et nourrira les futurs rapports sur cette guerre oubliée.