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Interview

Molly Reynolds : «Un compromis bipartisan sera nécessaire»

En cas de victoire, Hillary Clinton aura pour défi majeur de composer avec les républicains du Congrès, explique Molly Reynolds, chercheuse au Brookings Institution.
Molly Reynolds, chercheuse au Brookings Institution. (Photo DR)
publié le 26 octobre 2016 à 19h11

Molly Reynolds, spécialiste du Congrès américain au centre de recherche Brookings Institution installé à Washington, décrypte quelles pourraient être les conséquences électorales pour le Parti républicain en cas de désolidarisation de Trump.

Le Parti démocrate pourrait reconquérir le Sénat. En quoi est-ce important pour Hillary Clinton, si elle est élue ?

Il y a plusieurs facteurs pour lesquels il est important pour un président d’avoir une majorité au Sénat. Mais cette année, l’une des raisons majeures concerne les nominations. En vertu de la Constitution, le Sénat dispose du pouvoir de confirmer les personnes nommées à des postes de gouvernement - comme les membres du cabinet) et au sein du système judiciaire fédéral, y compris à la Cour suprême. L’un des sièges à la Cour suprême est vacant depuis février, et si les démocrates reprennent le contrôle du Sénat aux républicains, cela rendra plus facile la confirmation d’un magistrat, même s’il restera certains obstacles.

L’élection pourrait déboucher sur une victoire de Clinton, un Sénat à majorité démocrate et une Chambre des représentants dominée par les républicains. Quelles seraient les conséquences politiques ?

Un gouvernement divisé est le scénario le plus probable. Cela veut dire que pour accomplir quoi que ce soit, y compris les fonctions les plus basiques, tel qu’adopter le budget, un compromis bipartisan sera nécessaire. Si Hillary Clinton est élue, je pense que cela sera un défi majeur pour elle de travailler avec les républicains au Congrès. Si les élus décident de poursuivre une stratégie profondément obstructionniste, comme ils l’ont fait après l’élection de Barack Obama, il sera très difficile pour elle de mener à bien son programme législatif.

Paul Ryan et plusieurs candidats républicains ont pris leurs distances avec Donald Trump. Arriveront-ils à convaincre des électeurs qui rejettent le milliardaire de voter malgré tout pour des candidats républicains aux élections locales ?

C'est une question très importante, qui est au cœur de la stratégie actuelle des républicains au Congrès. Le «ticket splitting», c'est-à-dire les électeurs qui votent pour des partis différents selon le type de scrutin, est en déclin depuis les années 80. En 2012, seulement 10 % des électeurs ont voté pour un candidat présidentiel d'un parti et un candidat au Congrès d'un autre parti. Les républicains doivent inverser cette tendance s'ils veulent conserver le contrôle du Sénat. Certains sondages indiquent que des candidats républicains au Sénat font un meilleur score que Donald Trump dans certains Etats cruciaux. Ce sera un élément décisif de l'élection.

Si elle est élue, que pourrait faire Hillary Clinton pour tenter de changer la dynamique de blocage au Congrès ?

Sa marge de manœuvre sera limitée. En général, on a tendance à surestimer le pouvoir d'une seule personne à «changer la dynamique» alors que ce pouvoir est réparti entre de nombreux individus et que beaucoup ont la capacité de paralyser le processus. Sur certains sujets, comme les dépenses d'infrastructure et la réforme fiscale, il pourrait y avoir un compromis. Mais d'une manière générale, je m'attends à ce que l'impasse se poursuive dans de nombreux domaines.