L'ONG WWF publie, jeudi, son dernier rapport Planète vivante sur l'état de la biodiversité sur Terre. Le dernier rapport datait de 2014 et était déjà alarmant. Cette année, les données recueillies par la Société zoologique de Londres (SZL) démontrent, qu'entre 1970 et 2012, les populations vertébrées ont décliné de 58%, soit une baisse moyenne de 2% par an. D'ici 2020, cette perte pourrait atteindre -67%.
L'Indice planète vivante prend en compte 14 152 populations de 3706 espèces de vertébrés différentes. La principale cause de leur disparition est la destruction et la surexploitation de leurs habitats naturels, causées par l'expansion des terrains agricoles, l'exploitation forestière non soutenable, et les perturbations des cours d'eau. Selon le rapport, ces dégâts peuvent compromettre la capacité d'une espèce à s'adapter aux conséquences du changement climatique.
L'industrie destructrice du soja
WWF met l'accent sur l'impact croissant de l'industrie du soja sur l'environnement. Cette plante représente actuellement le principal aliment du bétail, des volailles et des porcs. Sous l'effet de la demande croissante de viande, en seulement 20 ans, la production mondiale de la graine de soja a été multipliée par deux. La superficie de la culture du soja en Amérique latine est passée de 17 millions d'hectares en 1990 à 46 millions ha en 2010 (dont 13 millions à destination de l'Union européenne). «Un tel essor a aussi son revers: des pans entiers de forêt, de savane et de prairie ont dû être défrichés au cours des dernières décennies pour augmenter cette production», décrit le rapport. Elle était de 278 millions de tonnes en 2013, selon la FAO, dont 75% sert à nourrir le bétail. Un chiffre qui monte à 93% dans l'UE.
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Le soja n'est pas seulement un ingrédient prisé par les végétariens, il est aussi largement consommé par les omnivores. Selon le rapport, en moyenne, un Européen consomme 61 kilos de soja par an, le plus souvent indirectement sous la forme de produits animaux (viande, lait, fromage etc.). «L'adoption par les pays à revenu élevé d'un régime alimentaire sain et équilibré, dans lequel la consommation de protéines animales serait ramenée au niveau recommandé par les nutritionnistes, suffirait à réduire la pression sur les écosystèmes naturels tout en bénéficiant à la santé des populations», affirme WWF.
Dans le Cerrado, la plus grande région de savane en Amérique du sud, à cheval entre le Brésil, le Paraguay et la Bolivie, 50% du territoire a été converti en terres agricoles depuis 1950. Une conversion majoritairement en faveur de la culture du soja, de l'élevage et de la production de charbon de bois. Cette région qui accueille 5% des espèces de la planète est une des plus menacées et surexploitées au monde. Chaque année, 14 000 km² de savane y sont converties en terres agricoles.
Les milieux d'eau douce sont les plus touchés
Les territoires d'eau douce, souvent oubliés parce qu'ils ne constituent que 0,8% de la planète, accueillent tout de même 10% des espèces connues sur Terre. Ils sont les plus affectés par la destruction de l'environnement. Selon l'indice Planète vivante, les vertébrés d'eau douce ont vu leur nombre diminuer de 81% entre 1970 et 2012. Les zones humides sont extrêmement affectées par l'activité humaine, notamment à cause des drainages et des défrichements pour agrandir des terrains agricoles ou construire des infrastructures. Selon l'Union européenne, plus de la moitié des zones humides en Europe et dans le monde a disparu au cours du dernier siècle. En leur sein, les espèces vertébrées ont diminué de 39%, entre 1970 et 2012, selon l'indice Planète vivante. Depuis 2005, ce chiffre repart légèrement à la hausse grâce à l'établissement d'espaces protégés.
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Les grands carnivores reviennent en Europe
«Au cours des XIXe et XXe siècles, les populations européennes de grands carnivores ont vu leurs effectifs et leurs aires de distribution fondre dramatiquement, en grande partie du fait de l'intervention de l'homme, qui les a chassées intensément et en a réduit l'habitat», décrit le rapport WWF. En partie grâce aux Directives oiseaux et habitats de l'UE, plusieurs de ces espèces ont été réintroduites dans le continent. Ainsi, par exemple, il y aurait actuellement entre 9 000 et 10 000 lynx boréals en Europe (hors Russie, Biélorussie et Ukraine), soit 18% de l'effectif mondial. Il y en avait quatre fois moins il y a 50 ans.