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Las de choco, les industriels à la recherche d’ersatz

Craignant une pénurie de cacao et souhaitant ne pas être dépendants d’une denrée à la production versatile, les marques imaginent déjà des produits de substitution.
Lors de la récolte de cacao, en 2015 à Agboville, au nord d’Abidjan. Le palmier à huile et l’hévéa concurrencent de plus en plus le cacao. (Photo José Cendón. Bloomberg. Getty)
publié le 28 octobre 2016 à 19h41

Peut-on fabriquer du chocolat sans cacao ? Les industriels se sont posé la question et continuent de mener des expériences au cas où… Pour ne plus dépendre de la filière cacao, trop instable et de plus en plus chère selon eux. Mais ce n’est pas une mince affaire de reconstituer l’arôme du chocolat avec des produits de synthèse, ou même naturels, contrairement à la vanille qui possède son équivalent chimique, la vanilline. La plupart du temps, le chocolat vendu en France ne contient donc que du cacao et du beurre de cacao (pour en être bien certain, se référer à la mention «chocolat pur beurre de cacao» ou «chocolat traditionnel»). Il reste néanmoins quelques pistes de recherche plus ou moins réalistes, plus ou moins sympathiques, qu’explorent les fabricants de chocolat et autres groupes agroalimentaires.

La farine de caroubier

La ressemblance est troublante avec le chocolat au lait. Les amateurs purs et durs ne se laisseront pas berner, car la farine du caroubier n’aura jamais le goût du chocolat noir. Mais il s’agit du substitut de cacao le plus efficace. Le plus naturel aussi, extrait de la graine du caroubier, un arbre qui pousse sur le pourtour du bassin méditerranéen. En outre, le bilan carbone de cette production est moins lourd que celui du cacao : le pays numéro 1 dans le monde pour le caroubier n’est autre que l’Espagne, d’où des distances d’exportation réduites. Cette farine est un épaississant bien connu de l’industrie agroalimentaire (nom de code : E410). De plus en plus employée comme ersatz de chocolat, elle se déguste par exemple sous forme de pâte à tartiner, facilement disponible en magasin bio.

La graisse végétale

C’était la relance de la guerre de Cent Ans. Au début des années 2000, la France et le Royaume-Uni s’opposent au sujet d’une directive européenne sur la confection du chocolat. La première exige qu’on utilise seulement du cacao et du beurre de cacao, le second réclame la permission d’ajouter d’autres ingrédients. Londres obtient gain de cause et, depuis 2003, les fabricants européens peuvent mettre jusqu’à 5 % de «matière grasse végétale» étrangère dans le chocolat. D’où le recours à des graisses moins chères que le beurre de cacao, issues de palme, de soja, de karité, d’illipé (une noix d’Asie de l’Est), de sal (l’arbre à encens) ou de noyaux de mangue. Et tant pis pour le mauvais gras dans l’organisme (pire que le beurre de cacao) et les scandales écologiques liés à la production de ces végétaux.

L’arôme chimique

Vous préférez le cacao ou le methylbutanal ? Pour les chimistes, le goût est quasiment le même - la saveur de ce composé évoque plutôt le malt. On peut aussi s’en servir pour fabriquer du faux fromage. Ou encore des pesticides et des produits pharmaceutiques… Le methylbutanal, également connu sous le nom d’isovaleraldehyde, est dérivé d’une bactérie lactique. Fort heureusement, cet arôme de synthèse n’est pas employé en France à la place du cacao. Et c’est la conclusion, provisoire, des grandes marques de chocolat : on ne fabrique pas de chocolat sans chocolat.