Les deux coprésidents et plusieurs députés du HDP, principal parti prokurde de Turquie, ont été placés en garde à vue dans la nuit de jeudi à ce vendredi, une mesure qui risque d’aggraver les tensions dans le sud-est à majorité kurde du pays. Selahattin Demirtas et Figen Yüksekdag, qui dirigent conjointement le Parti démocratique des peuples, ont été interpellés dans le cadre d’une enquête «antiterroriste» liée au Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), selon l’agence de presse progouvernementale Anadolu.
Ces arrestations, ordonnées par le parquet de Diyarbakir (sud-est du pays), représentent un coup de filet sans précédent contre le HDP, un parti farouchement opposé au président Recep Tayyip Erdogan. Avec 59 députés, c’est la troisième force parlementaire du pays. Au total, au moins 11 députés du HDP ont été placés en garde à vue, selon une liste diffusée par le parti et par le ministère de l’Intérieur. Parmi eux, figurent des poids lourds, comme Idris Baluken, président du groupe parlementaire HDP, et Sirri Süreyya Önder, figure respectée de la cause kurde.
Selahattin Demirtas et Figen Yüksekdag font l’objet de plusieurs enquêtes pour des liens présumés avec les rebelles kurdes. Selon Anadolu, leur placement en garde à vue a été décidé après qu’ils eurent refusé de répondre à des convocations judiciaires.
Une perquisition était en cours vers 4 heures du matin au quartier général du HDP à Ankara, selon les images retransmises en direct par la chaîne d'information NTV. «Le HDP appelle la communauté internationale à réagir contre ce coup du régime d'Erdogan», a déclaré le parti sur son compte Twitter.
Une explosion à Duyarbakir dans la foulée de l'annonce
Ce vaste coup de filet nocturne intervient dans un contexte très tendu dans le sud-est à majorité kurde de la Turquie, ensanglanté par des combats quotidiens entre forces de sécurité et membres du PKK, une organisation classée «terroristes» par Ankara, Washington et Bruxelles.
Quelques heures après cette annonce, une puissante explosion s'est produite devant un bâtiment de police de Diyarbakir, tuant 8 personnes et en blessant 100 autres, selon le Premier ministre turc, Binali Yildirim. Lequel a aussitôt mis en cause la rébellion kurde du PKK, qui «a montré à nouveau son visage perfide» selon ses mots.
Ces interpellations surviennent alors que la Turquie vit sous état d’urgence depuis la tentative de coup d’Etat de juillet. Des ONG accusent les autorités turques de cibler des médias critiques et des opposants sous couvert de lutte contre les putschistes présumés.