Menu
Libération
Ukraine

A Odessa, la fin de l'expérience Saakachvili

L’ancien président réformateur géorgien Mikhaïl Saakachvili, gouverneur depuis un an et demi de la région ukrainienne d’Odessa, a annoncé lundi sa démission, dénonçant des entraves à la lutte qu’il menait contre la corruption.
Mikhaïl Saakachvili à Kiev sur la place de l'Indépendance le 7 décembre 2013 avec l'opposition ukrainienne à Viktor Ianoukovitch. (AFP)
publié le 8 novembre 2016 à 17h28

Pour annoncer son départ, Mikhaïl Saakachvili a organisé une conférence de presse sur le port d'Odessa, devant un bâtiment flambant neuf. Ce nouveau centre de dédouanement n'a toujours pas ouvert, «car l'argent des travaux a été volé, et nous avons été trompés comme d'habitude», a déploré Saakachvili devant l'assistance. Sans mâcher ses mots, il a fustigé les autorités ukrainiennes en général et le président Petro Porochenko en particulier. Celui-là même qui a donné une nouvelle vie politique à l'ex-président géorgien tombé en disgrâce, en lui confiant la région d'Odessa en mai 2015, dans le but qu'il entreprenne des réformes de fond, et notamment y combatte une corruption endémique.

Mais après un an et demi en poste, Saakachvili exprime sa profonde frustration face aux méthodes qui n'ont pas changé, malgré les promesses du président ukrainien. «Personne ne m'a jamais autant menti», a lâché le gouverneur, qui a dû renoncer à la nationalité géorgienne pour accepter le poste à Odessa. Il n'a jamais réussi à s'entendre avec les élites locales, encore moins à les faire plier, s'opposant entre autre violemment au maire de la ville, Gennady Troukhanov, qui a torpillé une partie de ses projets.

«Je suis fatigué des promesses non tenues»

«J'en ai marre, a répété à plusieurs reprises Saakachvili. Je suis fatigué des promesses non tenues.» Il accuse Porochenko de ne pas l'avoir soutenu, privilégiant les «clans criminels». «L'une des raisons de son échec est qu'il avait évidemment beaucoup moins de pouvoir qu'en Géorgie afin de mener ses réformes, analyse Ioulia Shukan, spécialiste de la politique ukrainienne et maître de conférences à l'université de Paris-Ouest-Nanterre. Et Porochenko, qui l'a utilisé pour asseoir son pouvoir à Kiev, n'a jamais été très conséquent sur sa volonté de réformer, préférant finalement trouver un terrain d'entente avec les élites», au lieu de les purger.

Mais même s'il avoue avoir perdu cette bataille-là, Saakachvili, qui reste l'un des rares hommes politiques ukrainiens à avoir une bonne cote de popularité, est décidé à poursuivre le combat pour «débarrasser l'Ukraine de la sale corruption».