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Etats-Unis

Le Congrès, clé de la marge de manœuvre présidentielle

Les résultats des élections au Congrès, qui se tiennent également ce mardi 8 novembre, détermineront la marge de manœuvre du futur président. Explications.
Le dôme du Capitole, qui héberge le Congrès, ici en 2013, à Washington. (Photo Saul Loeb. AFP)
publié le 8 novembre 2016 à 14h05

La course au Congrès n'est pas moins cruciale que celle à la Maison Blanche : c'est là que se concentre véritablement le pouvoir au sein du système politique américain. Les résultats des élections au Congrès, qui se tiennent également ce mardi 8 novembre, détermineront largement la marge de manœuvre du futur président.

Pas de lune de miel

«Les dernières années ont été les plus polarisées de l'histoire récente du Congrès et rien ne permet d'affirmer que la nouvelle législature ne le sera pas encore plus. Entre autres parce que Hillary Clinton [en supposant qu'elle gagne, ndlr] est une figure plus clivante qu'Obama, explique Mark Jones, expert politique du Baker Institute (Rice University du Texas). Elle n'aura même pas la lune de miel initiale dont avait pu profiter Barack Obama».

Aux Etats-Unis, le président décide de la politique extérieure, nomme les juges et les ministres, «accorde la clémence» et promulgue des décrets. Mais c'est le Congrès qui adopte les lois, fixe les règles migratoires, contrôle le processus de l'impeachment, imprime les billets de banque et déclare la guerre (même si les présidents ont trouvé un moyen pour contourner cette dernière prérogative). Le Congrès est composé du Sénat (100 sénateurs, deux par Etat) et de la Chambre des représentants (435 députés), qui doivent s'entendre pour légiférer.

Renouvellement d’un tiers du Sénat et de toute la Chambre des représentants

«Le gouvernement sera plus divisé que jamais car s'il y a des chances réelles que les démocrates gagnent la majorité au Sénat, leurs chances de l'emporter à la Chambre des représentants, de minimes sont devenues nulles, depuis que Trump est remonté dans les sondages», commente Jones. La totalité des sièges de la Chambre des représentants va être renouvelée cette année, et un tiers des sièges au Sénat (34 sur 100). Depuis 2014, les républicains sont majoritaires dans les deux chambres. Pour reprendre la main au Sénat, les démocrates doivent récupérer 5 sièges (en cas d'égalité 50-50, c'est le vice-président qui désignera la majorité au Sénat, en donnant sa voix à son parti). Il leur sera très difficile de faire de même à la Chambre, car il faudrait que les démocrates ravissent 30 sièges à leurs adversaires, qui détiennent actuellement la plus grande majorité depuis des décennies. Ils peuvent néanmoins espérer réduire cet écart.

Ces élections ont été extrêmement coûteuses. Au 2 novembre, les sénateurs et les représentants avaient dépensé respectivement plus de 373 millions et plus de 579 millions de dollars. Les républicains ayant dépensé plus que les démocrates dans les deux campagnes, selon le Centre for Responsive Politics. «Le cycle de vie d'une campagne est très long, explique Jackie Speier, députée démocrate qui se représente cette année. Dès que vous êtes élu, il faut commencer à faire campagne pour le scrutin suivant, car les mandats ne durent que deux ans.»

 Limites de la cohabitation

Les sièges toujours vacants à la Cour suprême augmentent la pression sur les deux partis. C'est le Sénat qui doit confirmer les juges nommés par le Président, et les sénateurs républicains sont parvenus à repousser depuis huit mois la confirmation de Merrick Garland, choisi par Obama, dans l'espoir qu'un président républicain nommera un juge plus conservateur pour ce poste à vie. Mais si Clinton l'emporte et les démocrates s'emparent du Sénat, le candidat risque d'être encore plus progressiste.

Le mandat présidentiel qui s'achève a montré les limites de la cohabitation, la difficulté de faire avancer les dossiers quand le président appartient à un parti et que le Congrès est dominé par l'autre. Si Clinton gagne, elle risque d'entrer à la Maison Blanche avec la pire cote de popularité pour une première présidence. En outre, elle aura vraisemblablement à faire face à une procédure d'impeachment ou à des audiences au Congrès à cause des enquêtes du FBI, tandis que la vague populiste et l'insatisfaction générale des Américains, leur désillusion dans le système, qui ont explosé durant cette campagne, ne disparaîtront pas, même si Trump perd. Au contraire. «Le plus grand risque, conclut Speier, c'est que si Clinton gagne, Trump n'ira pas se cacher dans un coin tête baissée. Ce n'est pas dans sa nature. D'autant plus qu'il a pris goût à être sous le feu des projecteurs, comme jamais auparavant.»