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Libération
Vu de Berlin

Pourquoi Angela Merkel a accepté que le futur président soit social-démocrate

La chancelière conservatrice a dû se ranger derrière la candidature de l'actuel ministre des Affaires étrangères SPD, Frank-Walter Steinmeier. Il devrait être élu en février.
Angela Merkel et Frank-Walter Steinmeier, à Berlin, le 12 octobre. (Photo John MacDougall. AFP)
publié le 14 novembre 2016 à 15h56

Il est l’homme politique le plus populaire d’Allemagne. Le 12 février, Franck-Walter Steinmeier, membre du SPD (le parti social-démocrate) et actuel ministre des Affaires Etrangères, devrait être élu président fédéral. Lundi, les conservateurs de la CDU et le SPD se sont mis d’accord pour soutenir la candidature du chef de la diplomatie à la plus haute fonction de l’Etat. Avec cette concession à son allié social-démocrate, Angela Merkel – qui renonce ainsi à présenter un candidat de son choix – se retire une épine du pied : après des semaines de blocage, le choix du candidat qui occupera le poste avant tout honorifique de chef de l’Etat menaçait de virer au fiasco politique. La constellation de l’Assemblée fédérale (1 000 membres, à parité des députés du Bundestag et des représentants des Länder) est telle qu’un accord entre les deux composantes de la majorité était indispensable pour éviter un scrutin à tours multiples, qui aurait été considéré comme un signe de faiblesse pour la chancelière.

«Merkel a perdu au poker présidentiel»

Le choix de Steinmeier apparaît déjà comme une quasi-défaite pour celle qui n'a pu imposer un candidat conservateur : ses favoris – le président du Bundestag (Norbert Lammert) ou le président de la Cour Constitutionnelle de Karlsruhe – s'étaient l'un après l'autre finalement désistés. «Angela Merkel a perdu au poker présidentiel, estime le magazine Der Spiegel. La CDU dispose de davantage de grands électeurs à l'Assemblée fédérale et doit accepter un candidat imposé par le SPD.» «En ces temps de fractures, de mutations et d'incertitudes, où la cohésion sociale et la sécurité de notre démocratie sont compromises, le président de la République porte la responsabilité de défendre les valeurs libérales, sociales et démocratiques de notre Constitution. Leur préservation est assurément le plus grand défi de notre époque», a estimé le président du SPD, Sigmar Gabriel.

Dialogue avec la Russie

Franck-Walter Steinmeier est, pour la chancelière, le candidat du moindre mal. Tête de liste malheureux du SPD aux dernières législatives, le futur président est toutefois susceptible de faire de l'ombre à celle qui pourrait bien briguer un quatrième mandat. A la tête de la diplomatie allemande, Steinmeier s'est présenté en avocat d'un engagement plus actif de l'Allemagne pour résoudre les conflits internationaux. Défenseur d'une ligne plus souple envers la Russie que celle d'Angela Merkel, il incarne une diplomatie soucieuse de préserver le dialogue avec le Kremlin. Il n'a pas non plus hésité à critiquer la politique jugée trop belliciste de l'Otan envers Moscou. Il a à plusieurs reprises critiqué Donald Trump, qu'il a qualifié de «prédicateur de la haine», disant s'attendre à «des temps difficiles» sur le plan international après l'élection du milliardaire américain. Fils spirituel de Gerhard Schröder, dont il a soutenu les réformes d'inspiration libérale, ce juriste de 60 ans a gravi tous les échelons à l'ombre de son mentor.