Les Américains ne semblent décidément pas prêts à accepter le résultat de l’élection présidentielle, qui a donné le 9 novembre l’imprévisible Donald Trump vainqueur. Dernier rebondissement en date : la candidate écolo, Jill Stein, va demander le recomptage des voix dans le Wisconsin, la Pennsylvanie et le Michigan, trois «swing states» remportés de peu par le candidat républicain.
Jill Stein, qui a obtenu seulement 0,98% des suffrages, estime qu'il y a dans ces Etats des «preuves convaincantes d'anomalies». La procédure étant longue et coûteuse, elle a lancé mercredi une vaste campagne de fonds sur le Web. Un véritable succès. En l'espace d'une journée, sa cagnotte a atteint 2,5 millions de dollars (2,36 millions de dollars). Une somme suffisante pour contester, dans un premier temps, les résultats dans le Wisconsin. Le temps presse. La date limite dans cet Etat pour déposer un recours est, en effet, fixée à ce vendredi 25 novembre. La récolte de fonds se poursuivra pour envisager un scénario similaire en Pennsylvanie, pour lequel la deadline est fixée au lundi 28 novembre, et dans le Michigan, qui laisse jusqu'au mercredi 30 novembre pour une éventuelle contestation. La candidate espère au total récolter 7,5 millions de dollars.
.@DrJillStein is demanding vote recounts in Wisconsin, Michigan, and Pennsylvania: https://t.co/4hAewaen32 pic.twitter.com/ZaA3ko7Zh2
— Splinter (@splinter_news) November 23, 2016
Piratage
Cette demande s'inscrit dans un contexte de plus en plus fort de contestation des résultats. Selon une information mardi du New York Mag, un groupe d'experts informatiques et de juristes du Center for Computer Security and Society de l'université du Michigan estime que les machines de vote électronique dans ces trois mêmes Etats clés ont pu être manipulées ou piratées.
Dès lors, le groupe a exhorté la candidate démocrate, qui a remporté le vote populaire avec plus de 2 millions de voix d'écart, à exiger un recomptage des votes. Mais son équipe ne semble, pour l'heure, pas encline à contester ces résultats. Seule Heba Abedin, la soeur de Huma Abedin, le bras droit de Hillary Clinton, a appelé ses abonnés sur Facebook à faire pression sur le ministère de la Justice pour vérifier le vote. «Appelez le ministère de la Justice … et dites-leur que vous voulez que les votes soient vérifiés, écrit-elle. Même si c'est occupé, continuez d'appeler.»
On Facebook, Huma Abedin's sister, Heba Abedin, encourages her followers to call the Justice Department to have vote in key states audited. pic.twitter.com/y4BPazFPmL
— Yashar Ali 🐘 (@yashar) November 22, 2016
L'étude est vivement contestée. En cause : le manque – voire l'absence – de preuves crédibles. De l'aveu de l'un des auteurs, J. Alex Halderman, «la seule façon de savoir si une cyberattaque a pu changer le résultat est d'examiner de près les preuves physiques disponibles – les bulletins de vote papier et le matériel de vote dans des Etats critiques». Pour le professeur, qui s'est exprimé dans les colonnes de la revue Medium, les dernières cyberattaques du système de messagerie du Comité national démocrate et de la boîte mail de John Podesta suffisent à rendre crédible l'idée d'une attaque semblable lors du scrutin présidentiel.
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Le site FiveThirtyEight, spécialisé dans le journalisme de données, ne croit guère en l'étude. «Il n'existe aucune preuve claire que la méthode de vote utilisée dans un comté – par machine ou par papier – a eu un effet sur le vote», écrivent-ils dans un article publié mercredi. L'équipe de la candidate démocrate, au courant depuis une semaine, n'est toujours pas intervenue, laissant penser qu'elle doute, elle aussi, de la crédibilité de l'information.
Grands «électeurs sans foi»
Ce type de contestation n’a rien de nouveau dès lors que le résultat du vote est serré. Ce fut le cas en 2000 lors de l’élection présidentielle qui opposait Al Gore à George W. Bush. Le candidat républicain avait remporté la Floride – un swing state– avec seulement 537 voix d’avance, poussant Al Gore à demander à la Cour suprême de Floride un recomptage des voix. Un recours jugé anticonstitutionnel par la Cour suprême des Etats-Unis qui stoppa la procédure, au profit donc, d’une victoire de Bush.
En parallèle, des voix s'élèvent pour demander aux grands électeurs de ne pas respecter leur consigne de vote. Une pétition sur le site Change.org, intitulée explicitement «Au collège électoral : élisez Hillary Clinton comme présidente le 19 décembre», a réuni plus de 4,6 millions de signatures. Un chiffre à relativiser d'autant que la consultation est ouverte à tous les internautes, pas seulement aux Américains.
Six grands électeurs démocrates tentent actuellement de persuader leurs homologues républicains de ne pas voter pour Trump, quitte à aller à l'encontre de la volonté de leurs électeurs. Mais avec 37 grands électeurs à convaincre, un tel scénario reste peu plausible. Depuis la création du mode de scrutin indirect en 1787, seuls 82 grands électeurs, surnommés «faithless electors» (électeurs sans foi) auraient dévié de leur consigne «par initiative personnelle».