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Libération
Conflits d'intérêts

Trump : en Argentine, une histoire de famille au service des affaires

Mauricio Macri et Donald Trump, tous deux héritiers de fortunes nées de l’immobilier, se connaissent de longue date.
Le projet de Trump Tower à Punta del Este, en Uruguay. (Photo YY Development Group)
par Mathilde Guillaume, Correspondante à Buenos Aires
publié le 11 décembre 2016 à 19h10

«Il serait difficile de travailler avec quelqu'un dont le but est de construire des murs.» Cette déclaration du président argentin, le néolibéral Mauricio Macri, date d'un mois avant l'élection présidentielle américaine. A l'époque, soutenir ouvertement Hillary Clinton semblait peu risqué et pouvait surtout, dans une période de mécontentement de la population, lui attirer la sympathie de l'opinion publique argentine anti-Trump. Mais la victoire surprise du milliardaire a rendu le calcul caduc. Il a fallu rétropédaler au plus vite et contacter Trump afin de repartir sur de bonnes bases.

Passe-droits

Le président élu n'a pas manqué d'asséner une petite tape sur la main de Macri en le faisant attendre plusieurs jours avant de le rappeler. Après tout, «business is business». La presse argentine a révélé qu'en plus des congratulations d'usage, l'appel aurait porté sur la construction d'une Trump Tower de 35 étages en plein Buenos Aires. Ce projet, d'un budget de 100 millions de dollars (95 millions d'euros) et mené par un groupe d'investisseurs proche de Trump, est actuellement en suspens faute d'autorisation de la ville. Le maire de Buenos Aires, Horacio Rodriguez Larreta, étant l'un des plus proches alliés de Mauricio Macri, la presse n'a pas tardé à évoquer de possibles passe-droits. Des accusations démenties par les deux parties. Macri a par ailleurs insisté sur le fait qu'il avait pu parler à la fille de Donald Trump, Ivanka, non pas en sa qualité d'actrice clé dans l'entreprise familiale, mais parce qu'il l'avait connue enfant.

Les deux hommes, tous deux héritiers de fortunes nées de l’immobilier avant d’entrer en politique, sont en effet loin d’être des inconnus l’un pour l’autre. De 1979 à 1984, les deux familles s’étaient alliées pour que le groupe Trump construise à New York une tour de 150 étages sur un terrain acheté par le père du président argentin, l’homme d’affaires Franco Macri. Le projet n’a pas abouti mais a créé des liens entre les deux clans et bientôt, les Trump passaient des vacances chez les Macri, dans leurs propriétés de la province de Buenos Aires ou de Punta del Este, la cité balnéaire ultrachic uruguayenne.

Colère noire

Ces visites sont relatées dans les mémoires de Franco Macri, qui y raconte aussi qu'à la suite d'une défaite au golf contre Mauricio, Donald était entré dans une colère noire et avait brisé tous les clubs de son rival. Sans rancune : Trump est en train de construire à Punta del Este une tour d'appartements de luxe. «Vous voyez comme les planètes sont alignées ? ne craint pas d'assurer Felipe Yaryura, le principal associé des Trump en Argentine. Macri cherche des investisseurs étrangers et Trump souhaite s'introduire en Amérique du Sud…» Au-delà de leur rivalité, le futur locataire de la Maison Blanche pourrait bien avoir un allié en celui de la Maison Rose, le palais présidentiel argentin.