Istanbul, 9 mai 2011. Sous l’égide de l’ONU, la quatrième Conférence des Nations unies sur les pays les moins avancés a lieu en Turquie. Banque mondiale, Fonds monétaire international, Organisation mondiale du commerce, chefs de gouvernement, représentants de la société civile, tout le monde a répondu présent à cette grand-messe internationale. Une de plus, disent alors en substance les plus dubitatifs. Mais promis juré, cette fois elle ne s’apparentera pas à une hâblerie de plus. Ce qui se décide aujourd’hui à Istanbul, sera respecté demain. Demain, c’est justement en 2020. D’ici là, la moitié des 49 pays les moins avancés (PMA) de la PMA pour rejoindre celle plus prometteuses des pays en développement. Preuve qu’une dose de bonne gouvernance et une généreuse solidarité internationale peuvent contribuer à extraire de la pauvreté, ou de l’extrême pauvreté, des dizaines de millions de personnes.
Certes, il manque encore quatre ans pour que sonne la fin de la période décidée à Istanbul. Mais depuis mai 2011, le temps écoulé est désormais suffisamment long pour prévoir ce que sera l'avenir des PMA en 2020. Et à en croire la dernière édition du rapport qu'elle consacre chaque année à ces pays, publiée le 13 décembre, la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) est loin d'être optimiste. Au risque de faire de la conférence d'Istanbul un papotage de plus… sans lendemain.
Car les objectifs définis par les Nations unies en 2011 lors de la conférence d'Istanbul sont loin d'avoir été atteints. A peine 10 des 49 PMA de l'époque (ils sont 48 aujourd'hui), répondront en 2020 aux critères de reclassement qui leur permettront de devenir des pays en développement. Les experts onusiens espéraient, à l'époque, que la moitié d'entre eux seraient en mesure de pouvoir le faire à cette date. Depuis 1990, la proportion de pauvres vivant dans les 48 PMA a plus que doublé à l'échelon mondial. La part de ceux n'ayant pas accès à l'eau a également doublé pendant la même période, s'établissant à 43,5%. Et ces pays représentent désormais la majorité (53%) du 1,1 milliard de personnes dans le monde qui n'ont pas accès à l'électricité, en hausse de 50%. Le taux d'extrême pauvreté se situe entre 70 et 80% dans 6 PMA et entre 50 et 70% dans 10 autres.
«Cercle vicieux»
Le constat de la Cnuced est pour le moins préoccupent. «De nombreux PMA sont ainsi pris au piège de la pauvreté, cercle vicieux dans lequel la pauvreté se traduit par une mauvaise alimentation, une détérioration de la santé, un manque d'accès à l'éducation, aboutissant à une baisse de la productivité et de l'investissement». Seuls quatre pays ont relevé le défi et sont sortis de la liste des PMA : le Botswana, le Cap-Vert, les Maldives et les Samoa. Les trois derniers, classés parmi les Petits États insulaires en développement (PIED), bénéficient de conditions très particulières, avec des économies de petite taille et de faibles populations, où la moindre évolution positive se fait immédiatement sentir.
L'objectif mondial consistant à réduire de moitié le nombre de pays classés dans ce groupe ne sera pas atteint si la communauté internationale ne prend pas de nouvelles mesures. «Il y a un an, la communauté internationale s'est engagée à ne laisser personne de côté, mais c'est exactement ce qui arrive aux pays les moins avancés», déplore le secrétaire général de la Cnuced, Mukhisa Kituyi.