Lucian Wintrich est un conseiller en marketing et relations médias qui a fait parler de lui pour sa série de photos «Twinks 4 Trump» («Minets pour Trump») à la convention du Parti républicain. Plus récemment,
[ son exposition pro-Trump, organisée à New York et appelée «Daddy Will Save Us» ]
, a fait polémique. Seule une galerie a accepté d’accueillir cette série où Milo Yiannopoulos de Breitbart News pose dans une baignoire remplie de sang de cochon, et où
«l’homme le plus détesté des Etats-Unis»,
Martin Shkreli, tente de vendre une pilule rouge et bleu pour 20 000 dollars. Des manifestations ont eu lieu devant le lieu d’exposition.
Pourquoi êtes-vous un si fervent supporteur de Donald Trump ?
Obama a sûrement beaucoup de qualités, mais pendant sa présidence s’est développée une hyper-sensibilité, qui n’est pas américaine, aux idées teintées de multiculturalisme… Pour moi, le gouvernement fédéral devrait avoir très peu de pouvoir. Il ne devrait pas s’occuper du peuple américain comme d’un enfant. En termes de commerce et de régulation, je me retrouve dans beaucoup d’idées avancées par Trump.
Avez-vous toujours eu ces positionnements politiques ?
Non, je les ai développés à l’université. J’ai fréquenté une fac très progressiste. Quand j’y suis entré, je pensais être très progressiste et qu’il fallait être bête pour être conservateur. Puis j’ai réalisé que je vivais en vase clos. Tout le monde dans ma fac traitait les conservateurs d’idiots, et trouvaient que seuls les idiots ou les gens peu éduqués pouvaient croire en dieu. Vivre dans une telle pensée unique m’a donné envie de prendre le contre-pied. J’ai commencé à me faire l’avocat du diable en demandant aux gens pourquoi ils pensaient que le socialisme et avoir un gouvernement fort sont de bons systèmes, et très peu de gens ont pu l’expliquer. Plus je lisais et m’intéressais à l’idéologie conservatrice d’un point de vue historique, plus je comprenais que cela correspondait avec mes idées. Je crois en la liberté individuelle et dans le système capitaliste.
Avez-vous été surpris par les réactions suscitées par l’exposition «Daddy Will Save Us»? («Daddy» étant Donald Trump).
Parce que cela tient du domaine artistique, je pensais que les gens réaliseraient qu’il est incroyablement hypocrite de ne pas laisser une exposition avoir lieu et s’y opposer. C’est une des raisons pour laquelle je l’ai organisée. Voir des progressistes manifester contre de l’art m’a paru tellement drôle, je pensais qu’ils allaient se réveiller et réaliser que s’opposer à une exposition, c’est aller trop loin. J’ai vraiment été choqué par la réaction des galeries. C’est malheureux que notre pays soit devenu si partisan, considérant une philosophie politique tabou au point de ne pas vouloir s’y intéresser. C’est montrer une telle ignorance de ne pas essayer de comprendre le camp adverse.
Cela ne vous dérange pas de soutenir l’administration Trump dont au moins le vice-président est un opposant aux droits des LGBT ?
Le vice-président n’a pas vraiment de pouvoir, je ne suis donc pas inquiet que Mike Pence soit impliqué dans une législation à laquelle les communautés gays pourraient s’opposer. J’attendais vraiment un candidat républicain comme Trump qui n'utilise pas un discours communautariste. Aux Etats-Unis, ces dernières sont dévastatrices et dégoûtantes. Pour ces élections, les démocrates ont joué uniquement sur ça. Trump est tellement anti-politiques identitaires. Il ne s’est jamais adressé explicitement à une seule communauté. Il place tout le monde à la même enseigne.
Historiquement, Trump a embauché des homosexuels, alors qu'Hillary Clinton a été très opportuniste avec cette communauté. Depuis les années 80, certains des plus proches conseillers de Trump sont gays. Il a un jour dit que si Caitlyn Jenner [ancien athlète qui a changé de sexe et est devenue animatrice de télévision, ndlr] était dans la Trump Tower, elle pourrait utiliser n'importe quelles toilettes.
Comprenez-vous pourquoi beaucoup de gens ont vu la rhétorique de Trump pendant sa campagne comme de l’incitation à la haine envers certains groupes ?
Absolument. Nous sommes un pays toujours à 75% blanc. Cette campagne a beaucoup mis en cause ce que faisaient les blancs. A chaque fois qu'on se connectait sur Facebook ou sur le Huffington Post, on tombait sur des articles du type : «Chères personnes blanches, voilà pourquoi vous foirez tout cette semaine.» Même quand on est immigré. Ma famille est venue aux Etats-Unis pour fuir Hitler. Cela donc était très bizarre pour moi d'écouter mon grand-père raconter comment ma famille a été tuée par les nazis, puis de me voir dire que je suis responsable de l'esclavage… Face à cette rhétorique selon laquelle les blancs sont méchants, surtout les hommes, et qu'ils empêchent la société d'évoluer, beaucoup d'Américains ont dit «n'importe quoi je n'ai rien fait de mal, pourquoi est-ce que les médias me ciblent moi ?»
Trump a ignoré cette tendance. Certains de ces discours ont été incendiaires, c’est vrai, mais parfois on a besoin de créer une rupture en étant excessifs pour ramener tout le monde au même niveau…
Est-ce que cela surprend qu’en tant que jeune gay urbain, vous souteniez Trump ?
J’essaye de ne pas trop en faire la publicité… J’espère juste que nous reviendrons à une culture plus ouverte aux différences de points de vue et d’idéologies politiques, et une fois que ce sera le cas nous n’aurons plus besoin de quelqu’un tenant des discours aussi virulents que Trump. Nous pourrons avoir un candidat plus concentré sur la politique et moins dans la rhétorique. Mais, pour l’instant, je pense que nous avons vraiment besoin d’un Trump.