Rescrits fiscaux
0,005% d’imposition en 2014
A partir du moment où cette loi s'appliquait à toutes les entreprises étrangères en Irlande, Apple considère qu'il n'y a eu ni aide d'Etat sélective ni concurrence faussée. Une ligne de défense qui est également celle de l'Irlande. Pour Bruxelles, cette argumentation ne tient pas : les bénéfices en question proviennent de ventes réalisées dans l'Union européenne et doivent donc donner lieu au paiement d'impôts en Europe et pas aux Etats-Unis. Un raisonnement que conteste Apple, pour qui c'est en Californie qu'est créée la plus grande partie de la valeur de ses produits, dans ses laboratoires de R&D de la Silicon Valley. L'Irlande, où Apple compte tout de même 6 000 salariés dans la ville de Cork – sans compter des milliers d'emplois induits –, est avant tout une plateforme de logistique et de planification des ventes en Europe et ne compte que pour une toute petite partie des colossaux profits réalisés par Apple.
Donald Trump en embuscade
«Ce n'est pas une affaire qui vise à déterminer si Apple doit payer plus d'impôts, mais où il doit les payer», a expliqué Luca Maestri, son directeur financier, très remonté contre Bruxelles, dans une interview aux Echos. Apple préfère jouer la montre en attendant, comme nombre d'autres multinationales américaines, que les Etats-Unis baissent leur taux d'imposition sur les bénéfices, fixé à 35%. Un taux parmi les plus forts au monde – avec la France. L'élection de Donald Trump pourrait lui faciliter la tâche, même si son PDG, Tim Cook, avait pris ouvertement parti pour sa rivale Hillary Clinton lors de la campagne présidentielle, comme la quasi-intégralité de la Silicon Valley.
Le président élu a annoncé son intention de ne taxer qu'à hauteur de 10% les 2 434 milliards de bénéfices des multinationales américaines placés à l'étranger, qui seraient rapatriés aux Etats-Unis. Un chiffre qui a doublé depuis 2008. Trump, qui a tout récemment reçu 13 des plus grandes figures de la Tech américaine à la Trump Tower (dont Tim Cook), entend enterrer la hache de guerre et a également promis de réduire drastiquement l'impôt sur les bénéfices outre-Atlantique. Un discours qui tranche avec celui du candidat républicain durant la campagne, lorsqu'il menaçait Apple de taxer – ou de bloquer – tous les iPhone rentrant sur le territoire américain si le géant de Cupertino n'y relocalisait pas l'intégralité de sa production. Cook a expliqué à plusieurs reprises qu'il «adorerait» ramener ce magot aux Etats-Unis mais que cela restait irréaliste en l'état.«Quand nous le rapatrierons, nous paierons 35% d'impôt fédéral, mais aussi des impôts locaux, d'en moyenne 5%, ce qui fait 40%, a-t-il expliqué. Nous ne le ramènerons pas tant qu'il n'y aura pas un taux plus raisonnable.»
La Commission européenne qui s’inquiète d’un arrangement sur son dos entre le fisc américain et Apple a pris les devants : en attendant de savoir si la Cour de justice de l’UE validera ou non sa décision d’exiger le remboursement de 13 milliards par Apple au fisc irlandais, le groupe américain va devoir verser cette somme sur un compte bloqué. Pas question de se laisser doubler par Donald Trump qui lorgne lui aussi le magot d’Apple.