Dans la lutte contre le terrorisme, Donald Trump sera-t-il un atout ou un handicap ? A écouter les réactions du président élu à l'attentat de Berlin, on éprouve les plus vives inquiétudes sur ce point. L'attentat de Berlin, a-t-il dit, n'est qu'un épisode supplémentaire dans ce qu'il appelle «une guerre de religion». Cette déclaration contraste avec celles de leaders responsables des grandes démocraties. Première concernée, Angela Merkel a fait part de sa détermination tout en déclarant sagement qu'il n'y avait pas «de réponse simple» aux attaques revendiquées par l'Etat islamique. Barack Obama a dénoncé «l'extrémisme islamiste» qui est pour lui un phénomène politique. George W. Bush, en son temps, alors même qu'il parlait maladroitement d'une «croisade» contre le terrorisme, terme religieux, distinguait soigneusement les terroristes des musulmans qui vivent pacifiquement aux Etats-Unis.
Trump rompt avec ce distinguo sans doute trop subtil à ses yeux. Non que les attaques de Daech, comme le disent pieusement certains commentateurs lénifiants, n’auraient «rien à voir avec l’islam». L’idéologie de l’EI est évidemment une dérive pathologique du fondamentalisme musulman. Mais justement, cette dérive révulse une grande majorité des musulmans à travers le monde. La guerre de l’Etat islamique, autant que contre les «croisés» (les chrétiens), les juifs ou les incroyants, est dirigée aussi contre les musulmans qui réprouvent son idéologie. Une grande partie des attentats aveugles qu’il parraine ou qu’il organise frappent des populations musulmanes. Rejeter la masse de croyants de l’islam du côté de Daech en parlant d’une «guerre de religion», c’est faciliter le recrutement des jihadistes et affaiblir d’autant la cause de la démocratie. Sous prétexte de rompre avec la «bien-pensance», on aboutit à une stupidité stratégique.