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Libération

«Docteur Liza», humanité brisée

Publié le 26/12/2016 à 19h56

La Russie endeuillée pleure les 92 passagers de l’avion militaire qui s’est abîmé dimanche dans la mer Noire. Parmi les victimes, il y avait le chœur de l’Armée rouge, des journalistes, des militaires… Et Elizaveta Glinka, 54 ans, avec d’immenses yeux et une voix rauque. La directrice de l’association caritative Spravedlivaya Pomochtch («aide équitable») plus connue sous le nom de «Docteur Liza», était montée à bord du Tupolev pour accompagner une cargaison de médicaments destinés à l’hôpital de Lattaquié.

Dans le paysage humanitaire russe, Glinka occupait une place centrale. Elle œuvrait là où les services publics étaient absents ou inefficaces. A Moscou, elle était célèbre pour son aide aux plus démunis. Elle a participé au développement des soins palliatifs dans plusieurs villes de Russie, et à Kiev. Elle aidait aussi en cas de feux de forêt, d'inondations… «L'expression "personne n'est irremplaçable", ce n'est pas pour elle. Elle aidait toujours ceux que personne d'autre n'allait ni ne voulait aider», commente Zoya Svetova, membre, à ses côtés, du directoire de la fondation d'aide aux centres de soins palliatifs «Vera».

Membre active de l'opposition à Vladimir Poutine, Glinka a intégré en 2012 le Conseil consultatif pour les droits de l'homme auprès du Kremlin. A partir de 2014, elle a envoyé des médicaments et des vivres vers le Donbass en guerre, où elle s'est souvent rendue. Quand la Russie s'est impliquée militairement en Syrie, Glinka a monté un programme de distribution de médicaments et d'aide humanitaire aux civils. Tenace, «Docteur Liza» restait sourde aux critiques d'une certaine opposition qui lui reprochait de collaborer avec le régime à travers ses missions. Le 8 décembre, elle a été décorée par Vladimir Poutine. Sous les ors du Kremlin, elle a répété sa devise : «Nous, les défenseurs des droits de l'homme, sommes en dehors de la politique, comme les gens que nous défendons.»