Sex-toys, fouets, chaînes et autres objets masochistes, vidéos pornographiques amatrices classées selon des noms d’anciens papes… C’est la découverte faite par les policiers de Padoue, dans le nord-est de l’Italie, en perquisitionnant le dernier étage du presbytère de la paroisse San Lazzaro, dont le prêtre Andrea Contin avait la charge. Ce religieux de 48 ans est empêtré depuis un mois dans un scandale sexuel d’ampleur.
«Baie des cochons»
C'est par la dénonciation d'une paroissienne de 49 ans qu'est partie l'affaire. Elle explique avoir contacté le prêtre après son divorce dans l'espoir de trouver du réconfort. S'ensuivirent une relation amoureuse et des rapports sexuels qui, selon sa version, sont devenus de plus en plus extrêmes et violents. Elle précise avoir averti la Curie, les hautes instances de l'Eglise italienne – elle n'a jamais obtenu de réponse. Elle prévient alors la police. Le parquet de Padoue se saisit de l'affaire et ouvre une enquête pour «violence psychologique» et «proxénétisme». Contin est accusé d'avoir offert plusieurs de ses maîtresses à d'autres hommes contre rémunération et d'avoir organisé des orgies. Les enquêteurs doivent déterminer si la participation aux soirées était payante. Trois femmes ont déjà témoigné, mais l'une d'entre elles n'a pas souhaité porter plainte. Néanmoins, le nombre de victimes pourrait rapidement atteindre la vingtaine, selon le journal Il Mattino di Padova.
Le prêtre aurait également utilisé des sites de rencontre en ligne pour proposer des échanges libertins, selon l'historique de sa téléphonie. Il a aussi voyagé avec ses maîtresses à Rome et au Cap-d'Agde, où se situe le plus grand quartier libertin d'Europe. Du côté de «la baie des cochons», Contin n'a pas laissé un souvenir impérissable. Joints par Libération, les clubs de divertissement pour adultes ne se souviennent pas de ce visiteur parmi la masse annuelle de touristes. Les Italiens au Cap-d'Agde constituent une bonne partie de la clientèle étrangère, au même titre que les Allemands et les Espagnols. Le secret et l'anonymat sont bien gardés au village naturiste, et c'est sans doute une des raisons qui ont poussé Contin à s'y rendre.
Le prêtre, connu pour son charisme, était à la tête de la paroisse de 1 500 fidèles depuis dix ans. Selon les témoignages, il aurait continué ses activités scabreuses jusqu'à la fin du mois de novembre. La Curie était au courant, et le secrétariat de l'évêque a précisé qu'une enquête préliminaire avait été lancée. Selon le droit canonique, il s'agit d'une investigation sur la conduite morale lancée sans que la police n'en soit avertie. «Depuis le Patti Lateranensi [traité de souveraineté signé en 1929 entre l'Italie et le Vatican, ndlr], explique la Curie, on ne donne des informations aux autorités de l'Etat italien seulement si on a l'autorisation de tous les protagonistes.» Selon les médias nationaux, Contin aurait été invité par le passé à se faire soigner, mais cette précision n'a pas été confirmée : «Toutes nos informations sont confidentielles.»
«Un coup très dur pour les fidèles»
Padoue, ville de brouillard et d'églises, est situé dans une des régions industrielles les plus importantes de l'Italie. C'est aussi la ville de Saint-Antoine, dont la mâchoire trône fièrement dans la basilique qui lui est dédiée. La ville vient déjà d'être fragilisée par une crise politique ayant poussé avant Noël le maire d'extrême droite (Ligue du Nord) Massimo Bitonci à quitter son poste. Ce dernier assure à Libération n'avoir jamais été au courant de la situation : «J'ai été très surpris, j'ai rencontré deux fois le prêtre et je ne peux pas dire que je le connaisse. Je suis très préoccupé pour la communauté : c'est un coup très dur pour les fidèles de Padoue. En tout cas, il y a une enquête et il faut attendre que l'accusation soit démontrée.»
L'évêque de la ville, Claudio Cipolla, a lui aussi temporisé lors des célébrations de Noël. Absent, il a tout de même fait lire un prêche : «Il a le droit d'être entendu par le parquet et de se défendre des accusations auxquelles son nom est associé afin que la vérité soit faite.» Contin a pour le moment démissionné de sa fonction de dirigeant de la paroisse, et il serait parti en Croatie, dans sa famille. Contacté par Libération, son avocat, Michele Godina, n'a pas souhaité faire de commentaire.
Comble de l’histoire, l’ecclésiastique était arrivé dans cette paroisse de l’est de la ville en remplacement d’un autre prêtre controversé, Paolo Spoladore. Plus connu sous le nom de «Don Rock» pour sa façon d’exprimer sa foi en chansons, il avait été exclu du Vatican après la découverte de sa paternité.