Oubliées, les deux semaines de sécession de l’irréductible région wallonne, qui refusait fin octobre de donner son feu vert à la Belgique pour signer l’accord commercial de libre-échange UE-Canada, mieux connu sous son acronyme Ceta. Ce mercredi, c’est en présence du Premier ministre canadien, Justin Trudeau, que les eurodéputés devraient ratifier ce traité âprement négocié depuis sept ans entre la Commission européenne et Ottawa.
Lundi, quelques eurodéputés français, dont les deux candidats à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot, manifestaient encore leur désaccord envers ce traité «qui ne sert pas l'intérêt des citoyens mais des multinationales» - les opposants au Ceta dénoncent notamment l'existence du «système judiciaire sur l'investissement», qui permettra aux multinationales d'attaquer les Etats si elles s'estiment discriminées ou lésées. Autre critique, le fait que le Ceta ne prenne pas en compte l'enjeu climatique.
Malgré la mobilisation d'eurodéputés et une pétition signée par plus de 3,5 millions de citoyens à travers l'UE, l'issue du vote semble pliée. «Le Parlement européen est majoritairement de droite, et donc favorable au Ceta», résume Jadot. La majeure partie de l'accord (hormis certaines dispositions controversées) devrait entrer en application «provisoire» dès le 1er mars.
Puisqu'il s'agit d'un accord «mixte», les 38 assemblées nationales et régionales de l'UE devront à leur tour se prononcer. Un processus qui pourrait durer plusieurs mois, voire plusieurs années. Les obstacles sont légion. En France, c'est une Assemblée nationale quasiment vide (16 députés) qui a voté le 2 février une résolution non contraignante du Front de gauche pour inviter le gouvernement à «consulter le Parlement avant toute mise en œuvre provisoire de l'accord», «proposer un référendum populaire» sur le sujet et «demander à ce que la France saisisse la Cour de justice de l'UE sur la compatibilité du Ceta avec les traités européens». En parallèle, plusieurs voix dénoncent l'incompatibilité de ce traité avec la Constitution française (principe d'égalité, souveraineté nationale, principe de précaution).
Outre-Rhin, près de 200 000 citoyens allemands avaient déposé plainte auprès de la Cour constitutionnelle du pays. Le tribunal constitutionnel de Karlsruhe avait finalement autorisé le 13 octobre le gouvernement à approuver sous conditions le Ceta contre la garantie que l’Allemagne pourrait quitter l’accord si la Cour l’exigeait. Reste que personne ne sait vraiment ce qu’il adviendra si un ou plusieurs Etats européens venaient à ne pas ratifier l’accord.