Le premier test électoral de Paul Nuttall s'est donc soldé par un échec. Elu à la tête de Ukip, le parti europhobe en novembre, il pensait pouvoir surfer sur la vague nationaliste post-Brexit pour remporter haut la main l'élection législative partielle de Stoke-on-Trent. Cette ville de 250 000 habitants, située dans le centre de l'Angleterre, au cœur d'une ancienne région industrielle, a en effet voté à près de 70% en faveur d'une sortie de l'Union européenne le 23 juin. Un score qui lui vaut depuis le surnom de «capitale du Brexit». Mais ce bastion anti-européen, réputé pour ses céramiques, a choisi à plus de 37% le candidat travailliste, fervent défenseur du Remain.
Nombreux scandales
Paul Nuttall finit, lui, en deuxième position, loin derrière avec 24,6% des voix. Un revers pour cet ancien professeur d'histoire de 40 ans, qui espérait profiter de ce scrutin pour gagner en crédibilité. Huit mois après le référendum, Ukip a donc échoué à s'imposer. Il y a encore quelques jours, Nigel Farage, l'ancien leader avait pourtant été ferme en soutenant que «la victoire à Stoke serait cruciale pour le futur du parti». Mais la campagne désastreuse de Paul Nuttall, rythmée par de nombreux scandales, lui a certainement porté préjudice. Il avait d'abord affirmé avoir perdu des proches dans la tragédie de Hillsborough (le stade de Sheffield), en 1989, quand l'effondrement des tribunes au cours d'un match avait fait 96 morts. Avant de démentir sur son site internet, précisant qu'il s'agissait de «connaissances».
A lire aussi : Nigel Farage, un Brexit et puis s'en va
Le contexte politique a aussi joué en sa défaveur. «Lors de ce scrutin, les classes moyennes ont voté davantage conservateur. Et même si le parti de Theresa May n'arrive qu'en troisième position, il a progressé», explique à Libération Tony Travers, de la London School of Economics. «Maintenant que les Britanniques ont obtenu le Brexit, ils veulent un gouvernement compétent. Pour certains, c'était un vote de protestation, mais à l'arrivée, ce sont les conservateurs qui sont en charge de négocier le Brexit», souligne-t-il. Autre problème, depuis la victoire du 23 juin, «Ukip n'a plus de ligne conductrice ni de programme clair et n'arrive pas à s'affirmer. Or, ce sont lors de ces élections partielles que le parti a le plus de chances de décrocher un siège au Parlement, et il a échoué», commente l'universitaire.
«Sport d’endurance»
A quel futur peut désormais aspirer Ukip, qui voulait devenir le «parti du peuple» ? Les membres du parti se veulent rassurants. «La politique est un sport d'endurance. Cela nous a pris vingt-trois ans pour gagner un référendum pour sortir de l'Europe. Il nous faudra peut-être vingt ans pour décrocher un autre siège à Westminster. Nous sommes tous derrière Paul Nuttall», a déclaré sur la BBC Paul Oakden, président de l'Ukip.
Si les travaillistes ont conservé leur siège à Stoke, ils ont cependant subi un échec historique à Copeland, circonscription rurale de la côte nord-ouest de l’Angleterre, aux mains du Labour depuis 1983. Un coup dur dont se serait bien passé Jeremy Corbyn, le chef du parti, qui doit faire face à des divisions en interne au sujet du Brexit.