Un conseiller municipal aux confins du Nord de la Suède a soumis cette semaine une proposition quasi révolutionnaire : l'instauration d'une «pause sexe» quotidienne, d'une heure, pour les salariés de sa commune. «Les gens n'ont plus assez de temps pour être ensemble de nos jours», déplore Per-Erik Muskos, élu de la municipalité d'Övertorneå, ville qui souffre par ailleurs d'un déficit de natalité.
«Il faut encourager les naissances. Le sexe est une forme de sport dont les effets positifs sur le bien-être sont documentés, et la municipalité devrait donc faire d'une pierre deux coups […]» écrit-il dans sa motion, citée par le journal local Norrbottens Kuriren. Considérée dans les années 50-70 comme une société à la sexualité libérée et aux mœurs légères, la Suède a calmé ses ardeurs dans le tournant conservateur des années 80. Aujourd'hui, le déclin de l'appétit sexuel de ses habitants est devenu un sujet d'inquiétude nationale, après avoir été en 2013 l'objet d'une étude du tabloïd Aftonbladet. Les Suédois n'auraient plus que 3,8 rapports sexuels par mois en moyenne en 2013, contre cinq en 1996. Le gouvernement a donc lancé une nouvelle étude de trois ans en juillet afin d'enquêter sur les pratiques intimes de ses citoyens.
«Si les conditions sociales pour des relations sexuelles satisfaisantes se détériorent – à cause du stress ou de problèmes de santé –, c'est aussi un problème politique», écrivait le ministre de la Santé, Gabriel Wikström, dans le journal suédois Dagens Nyheter lors du lancement de l'étude. Le ministre ne recule pas non plus devant le sujet sur les réseaux sociaux. A un internaute furieux d'être réveillé par ses voisins en pleins ébats, il répondait ainsi en mai : «Ça a l'air plutôt sympa pour eux, selon moi. Tant mieux pour leur bien-être, et donc pour la santé publique.»
Pause fika et masturbation au travail
Il est vrai que les études sur les effets positifs des rapports intimes sur le bien-être abondent, que ce soit à propos des risques amoindris de crises cardiaques, de cancers du sein ou de la prostate, ou du sexe comme un remède contre la vieillesse. Or le bien-être des Suédois, et surtout au travail, est une préoccupation majeure du royaume. Les salariés prennent déjà une «pause fika» tous les matins, sorte de pause-café agrémentée de roulés de cannelle et autres pâtisseries nationales, durant laquelle ils peuvent deviser librement de tout, sauf de travail. Les couples se partagent à leur gré seize mois de congé parental, dont trois réservés aux pères.
La demande pour la mesure proposée par Per-Erik Muskos semble par ailleurs exister. Une étude de l'Association suédoise pour l'éducation sexuelle publiée cette semaine a révélé entre autres que 17% des Suédois admettaient se masturber au travail. «Je ne vois pas pourquoi ma proposition ne serait pas acceptée», soutient Per-Erik Muskos. L'élu espère qu'une fois adoptée, la pratique pourra s'étendre au pays tout entier. Rien cependant, dans sa motion, pour vérifier que les employés ne s'adonneront pas à une quelconque autre occupation lors du temps qui leur est alloué. «Ils pourront se promener s'ils veulent, assure-t-il. Et si on est obligés de vérifier, c'est bien la preuve qu'il y a un problème.»