Neuf ans et demi de prison pour corruption et blanchiment d'argent. «Neuf, comme le nombre de doigts de Lula», qui en a perdu un dans un accident du travail du temps où il était ouvrier tourneur. C'est la blague douteuse de la droite brésilienne, qui exulte après la condamnation, mercredi, de l'ex-président du Brésil (2003-2010) par le juge Sérgio Moro, chargé de l'affaire Petrobras, le groupe pétrolier contrôlé par l'Etat brésilien et pillé par les principaux partis, via des contrats surfacturés avec le secteur du BTP. Luiz Inácio Lula da Silva serait le véritable propriétaire d'un triplex en bord de mer construit et luxueusement équipé par le groupe du bâtiment OAS : un supposé renvoi d'ascenseur en échange de juteux contrats de l'entreprise avec Petrobras. Le juge a néanmoins préféré éviter un «traumatisme» au pays en n'arrêtant pas l'icône de la gauche latino-américaine, qui fera donc appel en liberté. Cette sentence attendue porte un coup dur à l'image de l'ex-leader syndical, comme à ses ambitions de revenir au pouvoir, après la destitution l'an dernier de sa dauphine Dilma Rousseff.
A 71 ans, Lula a certes vu son prestige terni par ce scandale qui aurait commencé sous son mandat. Cela ne l’empêche pas de caracoler en tête des sondages pour la présidentielle de 2018, avec 30 % des intentions de vote, même s’il souffre aussi d’un fort rejet. Lula est un symbole, celui de l’affirmation des couches populaires, qui l’adorent. La droite, elle, l’exècre et fait de sa mise hors jeu une obsession. Légalement, seule une condamnation en appel peut l’empêcher de candidater.
Son avenir politique est donc désormais entre les mains du tribunal de deuxième instance de Porto Alegre. Condamné ou pas, ses détracteurs estiment qu’il ne serait plus moralement en mesure de se présenter. Ce n’est pas l’avis de son parti, où Lula n’a plus d’héritier «compétitif», tous ayant été balayés par les affaires.