Menu
Libération
Retour de bâton

Au Canada, les universités profitent du «muslim ban» de Trump

Bien que légèrement modifié, le décret anti-immigration du président américain décourage certains étudiants étrangers, qui se détournent des facs américaines au profit de l'enseignement supérieur canadien.
Etudiants sur le campus de l'université de Yale, Etats-Unis, en 2009. (Photo Shannon Stapleton. REUTERS)
publié le 26 juillet 2017 à 16h26

Le décret anti-immigration de Trump pourrait profiter aux universités canadiennes, aux dépens des facultés américaines. Dans sa première version, le «muslim ban» interdisait l'entrée sur le territoire à tous les ressortissants de six pays – Iran, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen –, provoquant de nombreux incidents à la frontière. La Cour suprême a depuis affirmé que les salariés et chercheurs ayant accepté une offre d'emploi aux Etats-Unis, ainsi que les étudiants retenus par les universités du pays n'étaient pas concernés par le décret. Malgré cet assouplissement, les étrangers restent dans l'incertitude quant à la future politique du président Trump. Pour la rentrée 2017, les étudiants internationaux préfèrent donc se tourner vers le Canada.

Conscientes de l'atout que représente l'élite iranienne notamment – elle est très représentée dans la communauté scientifique – les facultés canadiennes multiplient les gestes d'ouverture. Dans sa newsletter, l'université de Montréal (UdeM) entend «contourner le décret de Donald Trump», en annonçant une bourse exceptionnelle destinée aux étudiants souhaitant présenter les résultats de leurs travaux lors de conférences internationales, en dehors des Etats-Unis. Ce fonds de voyage pourra atteindre jusqu'à 1 000 dollars et sera financé par les cotisations des étudiants. Une politique qui porte ses fruits pour sa prochaine année scolaire, puisque l'UdeM enregistre une hausse de 25 % des candidatures iraniennes. Parmi les 67 000 étudiants étrangers de l'université – soit 15 % –, la République islamique est le 8groupe le plus représenté.

Bond des candidatures

L'université d'Ottawa va plus loin en proposant d'exonérer de frais de scolarité les étudiants étrangers originaires des pays visés par le décret. Ceux-ci paieront alors la même somme que les Québécois. D'après le Global Citizen Project, un grand nombre d'universités constatent une augmentation nette des candidatures étrangères. Toronto enregistre une hausse de 57 %, l'université Wilfrid Laurier de 32 %, celle de Mc Caster à Ontario près de 33 % et la fac de Concordia, à Montréal, a vu ses candidatures bondir de 20 %.

«Il y a une hausse des demandes d'admission en provenance de pays qui sont sur la liste des décrets de l'administration Trump, ou même qui ne le sont pas, comme l'Inde, note Alan Shepard, recteur et vice-chancelier de l'université Concordia dans la Presse. C'est comme s'ils percevaient le message qu'ils ne seraient pas les bienvenus aux États-Unis.» Et si les talents délaissent les USA, ce sont à terme les entreprises qui pourraient bouder le pays, comme l'explique à la Presse Hubert Bolduc, président-directeur général de Montréal International, agence qui encourage l'investissement au Canada. Il «mise sur l'incertitude et l'impulsivité» qui inciterait les entreprises à s'installer dans le pays à la feuille d'érable. «Les entreprises ont horreur de l'incertitude et ne veulent pas être à la merci d'un tweet intempestif du président Trump. Auparavant, le talent suivait les entreprises, mais aujourd'hui, c'est l'inverse.»