C’est l’un des dossiers les plus sensibles du Brexit. L’une des priorités des négociations. Ce mercredi, le gouvernement britannique a publié un document sur la frontière entre l’Irlande et l’Irlande du Nord, véritable casse-tête aux répercussions aussi bien économiques que politiques. Entre 23 000 et 30 000 personnes, dont des citoyens européens non-irlandais et non-britanniques, traversent chaque jour cette frontière longue de 500 kilomètres. Mais la sortie du marché commun, de l’union douanière et de la zone de libre-échange, bref, le hard Brexit voulu par Theresa May, remet en cause la fluidité des échanges.
Dans son texte de clarification, le gouvernement exclut de mettre en place des «infrastructures physiques» et des «postes de douane», et souhaite que la démarcation entre les deux Irlande reste la plus invisible possible. Depuis la victoire du Brexit, la perspective du retour d'une frontière «dure» inquiète les défenseurs de la paix, qui craignent que sa réapparition ravive les tensions communautaires. Entre 1968 et 1998, les Troubles, le conflit qui opposa unionistes protestants et républicains catholiques, a fait plus de 3 600 morts. Londres le reconnaît : le cas nord-irlandais est unique et des solutions «flexibles et imaginatives» seront nécessaires. Malgré la réponse froide de l'UE à ses propositions sur l'union douanière, le Royaume-Uni compte sur sa bienveillance.
«Dommages collatéraux»
Quand les négociations reprendront le 28 août, les négociateurs britanniques proposeront, par exemple, d'exempter de contrôles à la frontière et des nouveaux tarifs douaniers les petites et moyennes entreprises qui représentent 80% du commerce. En plus de cet accord douanier allégé, le gouvernement veut maintenir la zone commune de voyage, mise en place en 1923 entre l'Irlande, le Royaume-Uni et plusieurs îles, ainsi que la libre-circulation des citoyens britanniques et irlandais renforcée par l'accord du Vendredi Saint de 1998. Reste à déterminer comment le gouvernement compte éviter que cette frontière ne devienne une porte dérobée. Encore une fois, le plan est flou. «Vos droits de citoyens sont permanents et inviolables. Vous pourrez travailler et vivre en Irlande du Nord et en Irlande exactement comme aujourd'hui», a promis Theresa May dans une tribune publiée ce mercredi dans The Irish News, un journal nationaliste basé à Belfast (Irlande du Nord). Des belles paroles et un optimisme qui ne rassure pas Sinn Féin. «Le gouvernement britannique nous traite comme des dommages collatéraux», regrette Michelle O'Neill, la chef de file du parti républicain, qui demande que l'Irlande du Nord obtienne un statut spécial dans l'UE. Le 23 juin 2016, 56% de ses habitants avaient voté pour rester, à contre-courant du reste du pays.