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Libération
Interview

Allemagne : «Un déficit de main-d’œuvre»

publié le 19 septembre 2017 à 21h28

Avec 252 milliards d’euros d’excédent commercial en 2016 et un surplus budgétaire de 24 milliards, l’économie allemande est en pleine forme. Mais derrière le succès des chiffres, des économistes pointent plusieurs vulnérabilités, à l’instar de la faible démographie, dont l’enjeu est tout aussi politique qu’économique.

A la veille des élections législatives fédérales, l’immigration est devenue un thème de campagne essentiel, notamment pour les populistes de droite de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD). Analyse de l’économiste et spécialiste du marché du travail à l’Institut allemand pour la recherche économique Karl Brenke.

L’Allemagne doit-elle s’inquiéter de sa faible démographie ?

On observe une nette baisse de la part de population en âge de travailler. Ce phénomène risque de s’accentuer dans les prochaines années, lorsque les travailleurs de la génération des baby-boomeurs partiront à la retraite. Cela ne manquera pas d’avoir de lourdes conséquences sur le marché du travail. Pour l’instant, ce déficit en main-d’œuvre a pu être compensé. Concrètement, il y a aujourd’hui beaucoup plus de femmes sur le marché du travail. Et l’âge moyen de départ à la retraite a été repoussé. L’immigration joue également un rôle important. Jusqu’ici, l’impact de la faible démographie n’est pas catastrophique. Mais le pays aura quand même besoin de 3 à 4 millions de travailleurs de plus dans les prochaines années.

L’immigration est-elle la solution ?

Oui. Car il est évident que l’augmentation du taux d’emploi atteindra vite ses limites. Nous avons en Europe une libre circulation des travailleurs et de très bons systèmes éducatifs. Pour minimiser l’impact d’une faible démographie sur son marché du travail, l’Allemagne devra donc s’en servir. Ceci étant, ce manque de main-d’œuvre devrait inciter les employeurs à investir davantage dans la formation.

Quid de l’immigration hors UE ?

Là se pose la question de la faible formation. Cela ne concerne pas les réfugiés syriens. Dans leur pays, l’école est obligatoire pendant neuf années et beaucoup de jeunes suivent des études supérieures, ce qui n’est pas le cas en Afghanistan, en Irak, ou encore dans la plupart des pays africains. Or l’arrivée en masse de personnes peu formées dans les secteurs peu qualifiés risque de tirer les salaires vers le bas.