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Elections allemandes

De 2005 à 2017, les coalitions qui ont fait Merkel

Elections en Allemagnedossier
Angela Merkel prend la parole devant le Bundestag le 9 mars. (Phopto Tobias Schwarz. AFP)
publié le 19 septembre 2017 à 16h12

Dimanche, les Allemands se rendent aux urnes. Selon toute vraisemblance, ce devrait être pour reconduire Angela Merkel à la chancellerie une quatrième fois consécutive. En 2005, 2009 et 2013, la leader de la CDU (Union chrétienne-démocrate, le parti conservateur allemand, allié au CSU en Bavière, droite) est devenue puis restée chancelière à l’issue des élections fédérales car son parti est toujours arrivé en tête. Mais, à chaque fois aussi, elle a dû composer avec une majorité de circonstances et un gouvernement de coalition. Idem en 2017 ? Petit tour d’horizon des épisodes précédents.

2005 : naissance de la «grande coalition»

L’Allemagne aime, en général, la stabilité à la chancellerie : après Konrad Adenauer de 1949 à 1963, Willy Brandt de 1969 à 1974, Helmut Schmidt de 1974 à 1982 et Helmut Kohl de 1982 à 1998, Gerhard Schröder est chancelier depuis 1998. Arrive l’été 2005 et une situation incongrue : Schröder engage la confiance de son gouvernement devant le Bundestag (l’Assemblée nationale allemande) en demandant à sa majorité (les députés du SPD, le Parti social-démocrate, centre gauche) de… ne pas lui accorder, pour permettre d’organiser des élections anticipées. Celles-ci ont lieu en septembre et débouchent sur un résultat bancal : 226 sièges pour la CDU-CSU (soit 37% des 614 sièges en jeu), 222 (36%) pour le SPD, 61 (10%) pour les centristes du FDP, 54 (9%) pour la gauche radicale de Die Linke et 51 (8%) pour les Verts.

Avec ce résultat, une foule de coalitions sont possibles : rouge-rouge-vert (SPD-Die Linke-Verts), feux tricolores (SPD-FDP-Verts), jamaïcaine (CDU-FDP-Verts)… C’est finalement la «grande coalition» (déjà entraperçue dans les années 60) qui aura le dernier mot. La CDU-CSU et le SPD, les deux grands partis allemands qui se partagent la chancellerie depuis 1949 (RFA puis Allemagne réunifiée), se mettent d’accord pour partager le pouvoir sur une majorité commune et forte de 448 députés, soit près des trois-quarts du Bundestag. Les ministères sont équitablement distribués entre les deux partis, mais la chancellerie revient à celui arrivé en tête du scrutin, la CDU, ce qui permet à Angela Merkel d’être confortablement élue chancelière par le Bundestag le 22 novembre. La coalition survivra jusqu’au bout de la législature, à l’automne 2009.

2009 : la droite noire-jaune au pouvoir

Le 27 septembre 2009, les Allemands retournent aux urnes pour départager le SPD et la CDU, qui codirigent le pays depuis quatre ans. Mais le parti de centre gauche est en position de faiblesse, puisque associé à un gouvernement dirigé par une personnalité de droite depuis 2005. La chute est spectaculaire : 146 sièges, soit 76 de moins qu’en 2005, au profit de tous les autres partis, y compris la CDU-CSU, qui envoie 239 élus au Bundestag, soit 38,5% du total. Die Linke (76 sièges) et les Verts (68) augmentent aussi leur contingent, mais ce sont les centristes du FDP (Parti libéral-démocrate) qui arrivent en troisième position avec un record de 93 sièges remportés.

Ce résultat est une aubaine pour la CDU-CSU, qui va changer d’allié : finie la «grande coalition» avec le SPD, le parti d’Angela Merkel s’allie cette fois aux centristes du FDP pour construire une majorité noire-jaune de 332 élus sur 622 (53,4%) au Bundestag. La chancelière, constamment haute dans les études d’opinion depuis son arrivée à la chancellerie, est reconduite dans ses fonctions pour quatre années de plus.

2013 : le retour de la grande coalition

Quatre ans plus tard, rebelote ou presque. Toujours aussi populaire, Angela Merkel demeure favorite pour un troisième mandat et emmène la CDU-CSU à ces nouvelles élections fédérales. Mais son allié, le FDP, a les mêmes difficultés que le SPD en 2009 : quatre ans dans l’ombre de Merkel au sein de la coalition gouvernementale l’ont rendu inaudible. Le parti centriste est en crise et ce scrutin va durement le sanctionner. Le FDP se voit ainsi devancé par Die Linke et les Verts ; pire, il n’envoie aucun député au nouveau Bundestag. Globalement, le résultat est favorable aux deux «gros», car Die Linke (64 députés sur 631) et les Verts (63) obtiennent moins de sièges que quatre ans plus tôt. A l’inverse, le SPD remonte à 193 et surtout, la CDU-CSU échoue à seulement cinq sièges de la majorité absolue (311 contre 316).

La reconduction d’Angela Merkel ne fait alors aucun doute, mais il lui reste à trouver une coalition, ce que la disparition du FDP du Bundestag rend bien plus compliqué que prévu. Die Linke trop à gauche, les Verts englués dans une polémique (plusieurs de ses membres sont accusés d’avoir défendu la pédophilie dans les années 80), la CDU-CSU se tourne rapidement vers le SPD. Les négociations prendront trois mois avant que la «grande coalition» ne soit ressuscitée pour quatre années de plus. Et Angela Merkel réélue chancelière une troisième fois.

Et en 2017 ?

Faudra-t-il une nouvelle coalition pour permettre à Angela Merkel de gouverner une quatrième fois, ou la CDU-CSU parviendra-t-elle cette fois à obtenir la majorité absolue au Bundestag ? Le mode de scrutin compliqué des élections fédérales allemandes rend délicat ce genre de pronostic. Chaque électeur dispose en effet de deux voix : une lui permet de voter pour un candidat de sa circonscription (comme aux législatives en France), l’autre pour une liste présentée par un parti à l’échelle de son Land. On peut donc voter pour un candidat écolo dans sa circo et en même temps pour la liste CDU de son Etat fédéral…

En attendant l’issue du scrutin de dimanche, la CDU-CSU de Merkel est en tête de toutes les études d’opinion depuis… quatre ans. Mais au-delà du score du parti au pouvoir, la principale inconnue du scrutin concerne l’entrée au Bundestag de l’AfD (Alternative pour l’Allemagne), le parti d’extrême droite, que les sondages créditent d’au moins 7% des suffrages depuis plusieurs semaines. Un score qui lui garantirait d’obtenir de nombreux députés : tous les partis qui obtiennent au moins 5% à l’échelle nationale (et qui s’imposent dans au moins trois des 299 circonscriptions) sont représentés au Bundestag. En 2013, il avait buté à 4,7%.