Menu
Libération
Allemagne

Le FN se félicite de la victoire des «alliés» d’outre-Rhin

Si les extrêmes droites française et allemande ont le même rejet de l’immigration et de l’islam, leurs visions économiques divergent largement.
Marine Le Pen, le 11 mars à Déols (Indre). AfD et FN ont officialisé leur rapprochement en janvier à Coblence, en Allemagne. (Photo Alain Jocard. AFP)
publié le 25 septembre 2017 à 20h36

Le résultat définitif des législatives n’était pas encore connu, dimanche en Allemagne, qu’en France plusieurs cadres frontistes se précipitaient déjà pour adresser publiquement leurs félicitations à l’AfD. Le parti nationaliste allemand est la première formation d’extrême droite à faire massivement son entrée au Bundestag depuis 1945, avec 94 députés.

La présidente du Front national, Marine Le Pen, a vu dans ce résultat un «nouveau symbole du réveil des peuples européens» et félicité «[ses] alliés» pour leur «score historique». Nicolas Bay, secrétaire général du parti, a lui interprété le vote comme un choix «patriote» (le mot est à la mode en ce moment au FN) et «une volonté plus forte que jamais du peuple allemand de combattre l’immigration incontrôlée et l’islamisme qui en résulte». Lui qui a succédé il y a peu à Marine Le Pen à la présidence du groupe «Europe des nations et des libertés» au Parlement européen, groupe qui compte (entre autres) un Allemand de l’AfD, a aussi salué ses «alliés» d’outre-Rhin.

AfD et FN ont officialisé leur rapprochement en janvier à Coblence, en Allemagne, lors d’un congrès aux allures d’internationale des nationalistes, un meeting et une conférence de presse avec Marine Le Pen côté français et l’eurodéputé Marcus Pretzell côté allemand (le PVV néerlandais était représenté par Geert Wilders, et la Ligue du Nord italienne par Matteo Salvini). Une réunion plus médiatique qu’autre chose.

S’ils se ressemblent sur certains points - un discours anti-islam, anti-migrants, anti-euro, anti-Merkel, anti-américain et pro-Poutine -, le FN et l’AfD n’ont surtout en commun que leurs critiques à l’égard des élites politiques et leur nationalisme. Des positions qu’on retrouve par ailleurs dans beaucoup de partis populistes actuels. Créée en 2013, l’AfD est plus libérale en matière économique que le FN, et plus conservatrice qu’elle n’est identitaire. De fait, à l’époque de Coblence, tous n’avaient pas apprécié la démarche : «Je trouve que le FN ne nous correspond pas du tout, c’est en fait un parti socialiste», avait protesté une tête connue de l’AfD, Georg Pazderski.

«Il n’y a pas de couple franco-allemand du nationalisme», analysait aussi à la même date Nicolas Lebourg, de l’Observatoire des radicalités politiques de la Fondation Jean-Jaurès. Et de résumer ce mariage opportuniste comme celui de «deux partis actuellement à la périphérie des droites et qui, face aux difficultés des partis conservateurs vis-à-vis de la crise sociale depuis 2008 et des réfugiés depuis 2015, tentent de se positionner auprès de leur électorat national comme relevant d’un réajustement planétaire des droites qui feraient d’eux non des extrêmes droites du passé, mais les mouvements transpartisans de demain».

Un point commun quand même : des axes d'ancrage différents selon les territoires. Comme il y a deux FN en France, celui du Nord, d'inspiration sociale, celui du Sud, plus identitaire et sécuritaire, l'AfD est nationaliste à l'Ouest et libérale à l'Est (lire page 3).

De plus, les partis français et allemand affichent tous deux des divisions internes. Une fois le résultat des législatives connu en Allemagne, Frauke Petry, l’une des principales dirigeantes de l’AfD, a annoncé qu’elle ne siégerait pas avec la formation au Bundestag, regrettant un virage radical et agressif. Une décision sur laquelle l’ancien vice-président du FN, Florian Philippot, qui a quitté le parti jeudi, s’est immédiatement projeté. «La radicalité ne sert à rien, le départ de Frauke Petry dénonçant ces dérives le montre. Il faut bâtir un patriotisme clair et rassembleur», a-t-il plaidé.