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Libération
Éditorial

Actifs bruns

publié le 11 décembre 2017 à 19h56

Qu'Emmanuel Macron ne soit pas un écologiste canal historique, qu'il danse un tango environnemental en France ou qu'il alimente un discours sur le mode «mon ami, c'est la finance», c'est une évidence. Il n'empêche : sur fond de démission du multilatéralisme (Trump) ou de vacance de leadership occidental (Merkel, May), le chef de l'Etat français endosse désormais une stature ambitieuse pour esquisser les contours d'une planète «great again» et désirable pour les générations futures. Pour se donner les moyens de rentrer dans les habits du global leader visionnaire, il devrait néanmoins articuler son discours, comme ses actes, autour d'un leitmotiv : sortir de l'âge des fossiles. Et entrer dans celui des possibles. Car il en va de l'énergie comme de la finance. Si les deux sont essentielles au fonctionnement du monde, les plus efficaces pour lutter contre le bouleversement climatique sont celles que l'on économise. Comment assurer la grande transformation de nos modes de vie et de production et tenter de limiter la hausse des températures à 1,5 degré d'ici 2100 ? En arrêtant, déjà, de développer - et de financer, y compris avec l'argent public - des projets d'énergies fossiles (gaz, pétrole, charbon), responsables des trois quarts des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Il faut chasser les actifs bruns, carbonés, climaticides, nichés dans les portefeuilles. Le plus grand fonds souverain du monde, celui de Norvège, montre la voie. Des grandes banques françaises semblent enfin se décider à le suivre. Le nouveau monde est pourtant là : les renouvelables. L'ancien, suicidaire : celui des énergies fossiles, que les pays du G20 subventionnent à 416 milliards d'euros par an. Et qui engendrent six fois plus de dépenses pour lutter contre leurs seuls effets sanitaires. L'état d'urgence climatique est aussi un état d'urgence sanitaire.