L'historien Iouri Dmitriev fêtera son 62e anniversaire à la maison. Sur décision d'un tribunal de Petrozavodsk, le directeur de la branche carélienne de l'association Memorial, en détention depuis un an, sera relâché sous contrôle judiciaire à la fin du moins de janvier.
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Accusé de pédophilie, Iouri Dmitriev a été arrêté dans son appartement en décembre 2016. Des photos de sa fille adoptive, découvertes dans son ordinateur personnel après une dénonciation anonyme, ont servi de pièces à conviction. Le sexagénaire n'a pas cessé de clamer qu'il photographiait la fillette dénudée pour documenter son état physique, à la demande des autorités de tutelle. Pour ses partisans, Dmitriev, victime d'une affaire fabriquée de toutes pièces, s'est retrouvé dans le collimateur des autorités pour son activité au sein de Memorial. Depuis des décennies, l'historien autodidacte épluche les archives d'Etat et arpente les forêts du nord russe, à la recherche des victimes des répressions staliniennes et des fosses communes dont la région est parsemée depuis les terribles années 30. Il a sorti de l'anonymat 40 000 noms. Et a découvert, à la fin des années 90, l'un des plus importants charniers du pays. A Sandarmokh, 236 fosses renfermant les restes de 9 000 fusillés pendant la Grande Terreur de 1937-1938. Dans une Russie qui cherche à oublier les pages sombres de son passé et à glorifier Staline, Dmitriev, qui a réussi à transformer Sandarmokh en lieu de pèlerinage international, dérange.
Expertise psychiatrique
L'association Memorial s'est largement mobilisée pour défendre l'historien, qualifié de prisonnier politique, et de nombreuses personnalités ont pris publiquement la parole pour demander sa libération, dont le metteur en scène Andreï Zviaguintsev et l'écrivaine Ludmila Oulitskaïa.
Après sa sortie de détention, Dmtriev devra néanmoins subir une expertise psychiatrique, à la requête de l'accusation, tandis que les fameuses photos vont être de nouveau être «analysées», bien qu'une deuxième expertise vient de rejeter leur caractère «pornographique». A la demande de la défense, l'historien sera interné à l'institut Serbski, à Moscou, ce qui semble constituer une bonne nouvelle pour ses soutiens, qui ont posté ce mercredi des messages d'espoir sur la page Facebook consacrée à «l'affaire Dmitriev».