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Libération

Pérou : disgrâce pour le président qui gracie

publié le 29 décembre 2017 à 20h26

Des milliers de personnes ont manifesté jeudi à Lima contre la grâce accordée à l’ancien président péruvien Alberto Fujimori par l’actuel chef de l’Etat, Pedro Pablo Kuczynski (dit PPK). Lequel a été interrogé ce même jour par la justice sur des soupçons de corruption. Cette grâce a aggravé la crise politique autour de PPK, qui s’était engagé durant sa campagne électorale de 2016 à ne pas libérer Fujimori. Or l’opinion soupçonne le président d’avoir négocié sa sortie de prison contre l’abstention de députés pro-Fujimori lors d’une procédure de destitution au Parlement.

L’ex-président purgeait une peine de vingt-cinq ans de réclusion pour crimes contre l’humanité : il avait, entre 1990 et 2000, mené une brutale répression contre la guérilla maoïste du Sentier lumineux. Les familles des victimes de cette «guerre sale» sont en pointe dans les protestations.

Jeudi, Kuczynski a été interrogé durant quatre heures par le parquet anticorruption dans le cadre de l'enquête Odebrecht. Les magistrats cherchent à savoir si une des entreprises de PPK a pesé dans l'attribution de marchés au géant brésilien des BTP, à l'époque où celui-ci était ministre. Ce scandale de corruption autour d'Odebrecht, qui a distribué généreusement les pots-de-vin pour obtenir contrats et chantiers, éclabousse presque toute l'Amérique latine. En quelques jours, plusieurs démissions ont eu lieu dans l'entourage de Kuczynski : un de ses plus proches conseillers, ses ministres de l'Intérieur et de la Culture. Ce dernier, Salvador del Solar, va pouvoir retourner à ses activités d'avant : acteur de telenovelas et réalisateur. Coup dur pour un chef de l'Etat décidément très lié au septième art, puisqu'il est cousin germain de Jean-Luc Godard. Pour envisager un avenir à la présidence de Kuczynski, il va falloir trouver un scénariste très imaginatif.