C'est une liste dans laquelle figure l'ensemble de l'élite politique et économique russe, ou presque. Le Trésor américain a publié lundi soir un document, surnommé le «Kremlin Report», dont la partie déclassifiée désigne nommément ceux que Washington identifie comme des proches de Vladimir Poutine, hauts fonctionnaires et oligarques, selon les critères de leur «proximité avec le régime russe» et leur «richesse personnelle».
La liste inclut l'ensemble de l'administration présidentielle, de son chef, Anton Vaino, au porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov ; le gouvernement (le Premier ministre, Dmitri Medvedev, le ministre de la Culture, Vladimir Medinski, ou encore le chef de la diplomatie, Sergeï Lavrov) ; les porte-parole du Sénat et de la Douma ; les dirigeants des compagnies d'Etat Gazprom et Rosneft, et 96 «oligarques» (les entrepreneurs russes qui, selon Forbes, pèsent plus d'un milliard de dollars). Mais aussi le maire de Moscou, le gouverneur de Saint-Pétersbourg et le directeur du FSB.
Ce «Who’s Who» vient compléter une loi adoptée l’été dernier par le Congrès américain qui vise à punir la Russie pour son intervention en Ukraine, son ingérence dans les élections américaines et ses atteintes aux droits de l’homme.
Au Kremlin, où le document était attendu avec nervosité, on joue la placidité : «C'est, bien entendu, un acte inamical, il complique les relations russo-américaines, déjà difficiles, a réagi mardi Vladimir Poutine. Nous étions prêts à prendre des mesures de représailles, assez sérieuses. Mais nous allons pour l'instant nous abstenir.»
«Il y a eu comme un soupir de soulagement à Moscou, constate la politologue Tatiana Stanovaya. Cette liste est tellement exhaustive qu'elle n'a pas de fonction politique immédiate. Elle ne peut pas être un outil pour introduire un clivage au sein de l'élite russe entre ceux qui soutiennent Poutine et ceux qui seraient prêts à prendre leurs distances. Les détracteurs de Poutine sont déçus, et ceux qui soupçonnent Trump de jouer le jeu de Moscou le soupçonnent encore plus.»
«Ce n'est pas une liste de sanctions», précise ce document, qui sera présenté au Congrès à Washington mais n'a aucune valeur juridique. L'effet recherché est avant tout psychologique et symbolique : lister des candidats potentiels aux sanctions dans laquelle les autorités américaines pourront piocher à leur guise, au gré de l'exacerbation des tensions. Y sont désignées les personnes avec lesquelles il devient risqué de faire des affaires. Une épée de Damoclès.