Dans son combat contre le droit à l'avortement, le gouvernement ultraconservateur polonais du parti Droit et Justice (PiS) n'a pas jeté l'éponge. Après les importantes manifestations d'octobre 2016 contre la loi visant à interdire totalement l'avortement, soutenue par l'Eglise catholique, le pouvoir avait fait marche arrière. Pour finalement réitérer ses attaques plus d'un an plus tard. Lundi, un projet de loi pour supprimer la possibilité d'avorter légalement en cas de malformation du fœtus, soit 90% des cas en Pologne, a été présenté pour étude au Parlement, à Varsovie.
L'avortement est interdit en Pologne sauf dans trois situations : en cas de malformation grave du fœtus, en cas de danger pour la femme et en cas de viol. Une des législations les plus restrictives en Europe, avec Malte et l'Irlande. Cette loi était attendue depuis plusieurs mois. Le 15 mars, la Conférence des évêques a publié un communiqué demandant à la majorité parlementaire de commencer «immédiatement» le processus d'étude du projet de loi au Parlement. L'organisation catholique radicale Ordo Iuris a gardé une forte influence sur le parti Droit et justice, depuis sa victoire à la présidentielle et l'obtention d'une majorité au Parlement en 2015.
«Notre seule arme est la solidarité et la mobilisation de masse»
«Quand, après les premières grèves des femmes le 3 octobre 2016, le PiS a retiré son projet d'interdiction totale de l'avortement, on a été informés que "l'Episcopat a autorisé les députés à retirer le projet", interpelle Marta Lempart, une des leaders de Polish Women's Strike, le mouvement né des manifestations de 2016. Nous n'allons donc pas prétendre ne pas savoir qui est aux manettes dans le pays. Episcopat, rappelle tes chiens !»
Les organisations de défense des droits des femmes ont immédiatement réagi en lançant un appel à la grève et à manifester devant le Parlement, à Varsovie, ce vendredi après-midi.
«Grand coup, l'affiche de «Women’s Strike» posée sur la porte du Sejm. [Les députés] devraient savoir ce que cette affiche signifie.»— ,,Polska w ruinie 🇵🇱💯 (@Polskawruinie1) March 23, 2018
«Nous allons tout faire pour bloquer ce projet de loi draconien, assure Krystyna Kacpura, directrice de la Fédération pour les femmes et le planning familial en Pologne. Notre seule arme est la solidarité et la mobilisation de masse. Seulement, même si on réussit à repousser la loi, nous savons que le gouvernement demandera au Tribunal constitutionnel, qu'il contrôle, de déclarer les exemptions à l'interdiction d'avorter contraires à la Constitution. C'est un combat beaucoup plus difficile à mener.»
Jeudi, près de 200 organisations de défense des droits des femmes internationales ont signé une pétition pour condamner ce projet de loi. En parallèle, sans que l'on en connaisse la raison, les réunions de la commission parlementaire chargée d'étudier le texte ont été annulées cette semaine. Elles devraient reprendre la semaine prochaine pour aboutir à un vote au Sejm.
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