On attendait une première décision aux alentours de Pâques, la voici. On s'attendait à ce qu'elle aille dans le sens d'une extradition de Carles Puigdemont, c'est également le cas. Le procureur général du Schleswig-Holstein, Land où l'ex-président catalan est détenu depuis le 25 mars, vient de reconnaître la validité en droit allemand des deux chefs d'inculpation de la justice espagnole - à savoir, «rébellion» et «détournement de fonds publics». Il estime également que le «maintien en détention» de Carles Puigdemont est nécessaire, en raison du «risque de fuite» en cas de remise en liberté. En somme, le leader indépendantiste est désormais à un cheveu de l'extradition en Espagne, où il risque jusqu'à trente ans de prison.
Certes, la décision finale n’est pas encore prise, la justice disposant de soixante jours pour se prononcer (avec une rallonge de trente jours si nécessaire). Mais c’est un premier pas. La question soulevée était la suivante : les deux principales accusations de la justice espagnole à l’encontre de Puigdemont sont-elles valables au regard du droit allemand ? Les juristes restent divisés sur le sujet. Certains, à l’image du vice-président du Bundestag, Wolfgang Kubicki (Libéraux), ont fait valoir que la «rébellion» telle qu’elle existe dans le code pénal espagnol n’a pas d’équivalent en Allemagne. D’autres, à l’inverse, estiment que l’article 81 du code pénal, qui punit le Hochverrat, la «haute trahison», s’en rapproche. C’est cette dernière interprétation qui a été retenue par le parquet.
Toutefois, cet article 81 requiert également que le perpétrant ait usé de la violence contre la Fédération ou la Constitution. Ou, a minima, il faudrait établir que des violences commises par d'autres personnes soient directement imputables à Carles Puigdemont. C'est en ce sens qu'il a présenté lundi en Espagne un recours contre son inculpation pour «rébellion», soulignant l'absence de violence dans ses actes. Selon lui, si des violences sont intervenues, elles ont été ponctuelles et attribuables «uniquement aux personnes qui ont mené ces actions».
Depuis le début, le gouvernement semble marcher sur des œufs. Le soir de l'arrestation de Puigdemont, la ministre de la Justice, Katarina Barley (SPD), invoquait prudemment la séparation des pouvoirs. Vendredi, on apprenait dans le Spiegel que le gouvernement fédéral ne s'opposerait pas à une extradition. Car Berlin a le pouvoir de le faire. Mais, selon le magazine, le ministre des Affaires étrangères, Heiko Maas (SPD), comme Katarina Barley à la Justice, se sont mis d'accord : pas d'ingérence politique.