Le bad boy du cinéma indien, colosse aux muscles surhumains et invincible héros du grand écran, vient de tomber pour avoir tué deux inoffensives antilopes indiennes. Salman Khan, l'une des plus grandes stars du 7e art en hindi, a été condamné à cinq ans de prison pour le braconnage de ces animaux protégés, lors d'une expédition de chasse menée en 1998 dans les environs de Jodhpur avec quatre autres acteurs. Ces derniers, dont le célèbre Saif Ali Khan, ont été acquittés, faute de preuve, alors que Salman Khan a écopé de cette lourde peine, en plus d'une amende de 10 000 roupies (126 euros). Il passera la nuit dans la prison centrale de Jodhpur et ses avocats réclameront sa libération sous caution ce vendredi matin.
«Délinquant habituel»
C’est la quatrième fois en vingt ans que le sulfureux acteur de 52 ans, le mieux payé de l’industrie indienne en 2015 avec un revenu annuel de 26 millions d’euros, est envoyé derrière les barreaux dans cette affaire poursuivie de manière opiniâtre par la communauté locale des Bishnoïs, connue pour leur défense de l’environnement du Rajasthan. Il a déjà été condamné en premier appel dans deux autres plaintes liées à ce braconnage mais il a, à chaque fois, réussi à être blanchi en appel.
Les magistrats de Jodhpur ont justifié leur sentence par le fait que Salman Khan était un «délinquant habituel». La vedette a en effet déjà été condamnée en 2015 pour homicide involontaire : les juges de Bombay l'ont reconnu coupable d'avoir tué un sans-abri endormi sur un trottoir, en lui roulant dessus avec sa grosse voiture de sport en 2002. Là encore, son armée d'avocats a réussi à retarder la procédure pendant plus d'une décennie ; un policier témoin de la scène, l'accusant du crime et apparemment incorruptible a été enlevé avant de mourir dans des conditions louches. De nouveau, comme dans un de ses films à succès où il campe des héros romantiques et indestructibles, Salman Khan est passé entre les mailles de la justice par un appel qui l'a acquitté en décembre 2015.
Industrie inquiète
Ces déboires font de Salman Khan l'une des figures les plus controversés du cinéma indien. Il compte des centaines de milliers de fans inconditionnels, qui admirent son image de «grand frère» toujours prêt à protéger les femmes fébriles et enamourées grâce à ses muscles de fer. Des centaines s'agglutinent ainsi chaque week-end sous les fenêtres de son immeuble de la baie de Bandra, à Bombay, en espérant apercevoir leur idole. Ils affirment que ces affaires judiciaires sont montées de toutes pièces et croient en la «bonté» de leur demi-dieu. Car le violent Salman Khan a cherché à redorer son image : il a créé en 2007 une fondation, appelée judicieusement «Being Human» (être humain), qui vend des tee-shirts dont une partie des revenus sert à aider des enfants handicapés ou pauvres. Mais beaucoup ne sont pas dupes : «C'est un homme idiot, violent. Un vrai parrain mafieux», s'emporte Supriya, une jeune femme de New Delhi.
Il est probable que le caïd soit rapidement relâché sous caution, mais l'industrie de Bollywood est inquiète : Salman Khan est une vraie machine à sous. Ses films sont des francs succès et engendrent à chaque fois plus de 60 millions d'euros de recettes. Cette condamnation retentissante a au moins un intérêt : celui d'entraîner un débat sur la protection des espèces animales menacées. «S'il veut vraiment racheter son crime, Salman Khan peut maintenant lancer une autre fondation pour la défense de ces animaux», lance ainsi, d'un air provocateur, la militante de la cause animale Ambika Shukla lors d'un des nombreux débats télévisés organisés ce jeudi autour de cette affaire.