Un communiqué très laconique, dans la tradition du Vatican quand les histoires sont embarrassantes. A Rome, mardi, le Saint-Siège a donc «pris note de la décision rendue publique par les autorités judiciaires en Australie. L'an passé, le Saint-Père avait accordé un congé au cardinal Pell pour qu'il puisse se défendre». Quelques heures auparavant, la justice australienne avait fait savoir que l'ex-numéro 3 de la curie serait jugé pour des faits d'agressions sexuelles. La date du procès doit être fixée de manière imminente. Jamais un prélat de si haut rang n'avait été inquiété par la justice pour de telles accusations.
«Le cardinal Pell ne pourra pas bénéficier de l'immunité diplomatique ; c'est ce que sous-entend le communiqué du Vatican», estime le vaticaniste italien Iacopo Scaramuzzi. L'ex-«ministre des Finances» du Vatican, assainissant les finances parfois douteuses du micro-Etat, avait quitté ses fonctions en juillet, contraint de rentrer dans son pays pour répondre des accusations d'abus sexuels dont il fait l'objet depuis plusieurs années.
Le prélat a décidé de plaider «non-coupable». Au terme d'un mois d'auditions, le tribunal de Melbourne a écarté plusieurs charges contre lui, les plaignants n'étant pas crédibles aux yeux de la justice australienne. Pour le moment, en raison de la procédure, les détails des faits reprochés au cardinal ne sont pas connus. Le pape a choisi de garder le silence, affirmant qu'il parlerait «quand la justice aurait parlé».
Après son désastreux voyage au Chili en janvier, François a opéré un virage majeur sur la pédophilie. La semaine dernière, il a reçu très longuement trois victimes du prêtre chilien Fernando Karadima, figure marquante dans son pays avant de tomber pour des faits de pédophilie. Plusieurs de ses victimes avaient accusé des membres de la hiérarchie catholique chilienne d'avoir couvert Karadima, mettant particulièrement en cause l'évêque Juan Barros. Le pape lui avait pourtant apporté un soutien inconditionnel. Il a opéré un revirement spectaculaire. François a d'abord chargé un homme de confiance d'une enquête sur place. A la lumière de ses conclusions, il a fait amende honorable dans une lettre du 8 avril aux évêques chiliens. «Cela me cause beaucoup de douleur et de honte», écrivait-il, reconnaissant de «graves erreurs d'évaluation et de perception». Un ton peu habituel dans la bouche d'un pape…